Il serait plus judicieux de discuter d'un accident dans un sujet dédié que dans le sujet sur la RM concernée (l'autre sujet a malheureusement été fermé, mais cela a l'avantage faire passer sous silence plus rapidement ce qui s'est passé).
Pour commencer il faudrait savoir avec plus de précision ce qui a été constaté par les témoins.
En temps normal, c.à.d. en fonctionnement automatique télécommandé (sans présence de personnel au pupitre de commande de la station motrice), chaque cabinier donne le feu vert et le déroulement de la course est entièrement automatisé. Les informations de la position des véhicules sur la ligne sont acquises par le répétiteur de course (répétiteur de marche, Kopierwerk en allemand), un dispositif redondant mécanique ou, le plus souvent aujourd'hui, électronique. Ce dispositif, dont la fonction peut être assurée par un automate programmable de sécurité de la commande ou être constitué d'unités séparées transmettant des informations à la commande, est déterminant pour la sécurité car il permet de déterminer quand les véhicules se trouvent dans des zones à vitesse réduite imposée (approche des stations (dites gares en France) et passage des ouvrages de ligne (pylônes)). Outre la position est évidemment également surveillée la vitesse et le sens du mouvement. En cas de survitesse ou d'erreur de sens de mouvement un arrêt d'urgence par freinage mécanique est initié.
Pour ête complet on peut encore mentionner la surveillance du point fixe qui est généralement un point de référence détecté au passage d'un pylône ou d'un cavalier et transmis à la commande par voie filaire. Ce point fixe doit être détecté dans une certaine fenêtre de tolérance de la position mesurée par le répétiteur de course faute de quoi une erreur de répétiteur de course est générée et en pareil cas la course est interrompue et doit être terminée à vitesse réduite en pilotage manuel à vue (avec pontage de certaines sécurités) car la commande considère qu'aucune référence de position n'est disponible. Il existe encore d'autre systèmes de points fixe (codeurs indépendants, marquage magnétique ou, devenu rare, marquage avec pastille radioactive, du câble tracteur.
La position de fin de course finale en station est détectée au moyen d'interrupteurs de fin de course qui réinitialisent également les répétiteurs de course (à noter que les deux cabines n'arrivent généralement pas en même temps en fin de course, la première arrivée repose sur son butoir alors l'autre est tirée en position finale).
Après l'immobilisation en station, l'entraînement est normalement maintenu mécaniquement à l'arrêt au moyen du frein de service et du frein sécurité qui sont tous deux failsafe (action par ressorts de compression ou par contrepoids avec transmission de la force par voie mécanique) et l'entraînement électrique est coupé (en principe avec sectionnement avec séparation galvanique de la liaison entre le moteur et son alimentation (p.ex. variateur de fréquence ou courant continu, sont réservées des solutions avec blocage d'impulsions des étages de puissance réalisé en niveau de sécurité SIL3), il y a toujours au moins une double coupure au niveau électrique.
Les défaillances à cause commune des deux dispositifs de freinage sont extrêmement rares, de mémoire il y a eu un cas de dysfonctionnement électrique et un cas de projection d'huile hydraulique sur les surface d'action des freins (dans les deux cas le frein de chariot avait été actionné manuellement par un cabinier).
Sans entrer encore plus dans les détails, il apparaît qu'une mise en mouvement fortuite une fois que l'ouverture des portes a été effectuée ne peut que résulter d'une erreur humaine grave ou un d'une défaillance technique grave.
En l'absence de précisions on est réduit à formuler des hypothèses. Il serait aussi intéressant de connaître la réaction du personnel (actionnement du bouton d'arrêt d'urgence (même si probablement inutile dans ce cas) et, si présent, le frein de chariot aurait dû être actionné immédiatement si la cabine se met en mouvement avec portes ouvertes en station).
Normalement si les portes sont ouvertes le frein de sécurité et de service immobilisent l'entraînement et l'entraînement électrique est coupé. Si les freins n'avaient pu se fermer l'installation se serait remise en mouvement immédiatement à la coupure de l'entraînement, donc avant l'ouverture des portes. On peut donc supposer que les freins on d'abord fonctionné normalement (ou du moins suffisamment) puis se sont rouverts intempestivement ce qui constitue une défaillance extrêmement grave.
Le maintien en arrêt en régulation de position sans fermeture des freins est improbable car la conception de la commande ne devrait pas le permettre vu que la coupure d'entraînement après l'immobilisation en station est impérativement prescrite. Une mise en mouvement avec freins serrés fonctionnant normalement avec réenclenchement intempestif de l'entraînement est peu vraisemblable car il faudrait alors vaincre la force de freinage cummulée du frein de service et du frein de sécurité.
Selon la conception et l'âge de la commande électronique plus ou moins d'informations sont enregistrées automatiquement (à l'instar des "boîtes noires" (enregistreurs de données de vol) des avions). Dans certains cas on dispose de logs complets avec les vitesses, courbes de décélération, pontages manuels etc.), le cas échéant le constructeur de la commande doit venir sur place pour downloader ces enregistrements auxquels l'exploitant n'a pas accès (et seul le fabricant sait réellement ce qui est loggé).
Perso je vois deux groupes de causes principales (qui peuvent être combinées ou non):
1. Erreur humaine directe grave.
2. Défaillance technique grave
Pour ce qui est de l'erreur humaine, il faut une intervention volontaire non autorisée par le constructeur, comme p.ex.:
- Exploitation avec pontage de sécurités dans des conditions non admissibles (le pontage de sécurités est autorisé dans des conditions très particulières, p.ex. pour ramener les cabines en station après une perte de référence de position, panne de commande, etc.).
- Manipulations non autorisées au niveau électrique (p.ex. utilisation d'une console de programmation pendant l'exploitation avec passagers autres que du personnel technique, modification non autorisée du câblage, commande des variateurs avec le display dédié, plusieurs accidents ou incidents sont dus à de telles causes).
- Manipulations non autorisées au niveau mécanique (p.ex. manoeuvre de vannes du système de freinage).
Pour ce qui est des défaillances techniques il est difficile de se prononcer mais il est certain qu'une telle défaillance résulterait, sauf erreur humaine (maintenance inadéquate, modification interdites....) vraisemblablement d'une très grave erreur de conception technique car si le niveau de sécurité exigé par les prescriptions légales et les normes est respecté, la probabilité de défaillance dangereuse est extrêmement faible.
Comme mentionné plus haut, je pencherais plutôt pour une réouverture inopinée des deux freins. Comme, sauf erreur de conception grave, la partie hydraulique d'un frein de service régulé (avec servovalve de pression et vanne de sécurité) et d'un frein de sécurité non régulé est très fiable, une erreur dans la génération des signaux d'ouverture des freins me paraît plus probable.
Pour une analyse plus poussée il faudrait disposer des schémas hydrauliques et surtout électriques ainsi que des logiciels. Avec les commandes de sécurité programmables une erreur de programmation grave peut avoir des conséquences fatales. Des erreurs apparemment anodines aussi bien dans la conception des schémas électrique que de la réalisation effective du câblage (même à schéma de base identique) des installations peuvent également avoir une influence importante sur la sécurité. La conformité au niveau de sécurité exigé doit être vérifiée en détail sur place, le seul examen des schémas électriques n'est pas suffisant et cet examen requiert de l'expérience pratique.
J'ose espérer que les expertises seront confiées à des spécialistes réellement
indépendants et compétents et surtout non liés à des sociétés de contrôle privées.
Ce message a été modifié par Velro - 02 janvier 2012 - 02:05 .