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L'Economie Montagnarde En transition entre tradition et adaptation

#1 L'utilisateur est hors-ligne   Pierre31 

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Posté 03 septembre 2014 - 01:29

Lors d'un stage au sein de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Toulouse fin 2013, en tant que chargé d'études junior, je participais à la rédaction d'une plaquette mensuelle réservée aux élus de la CCI et aux employés de celle-ci. J'avais pour mission de synthétiser un sujet plus ou moins vaste en 2 pages ! Au mois de décembre, pour coller aux vacances de noël à la neige, j'avais proposé un sujet sur l'économie montagnarde avec un focus sur un secteur bien précis et connu dans ce forum qu'est l'aménagement en montagne......et mon supérieur l'avait accepté....pour le proposer pour la mensuelle de février 2014 ! Le titre et le sous-titre de la rubrique étaient les mêmes que ceux ci-dessus. J'avais pour sources l'Observatoire des Territoires (Montagne), le Schéma du Massif Pyrénéen, Légifrance, le Rapport d’information du Sénat sur l’avenir de la montagne et l'INSEE. Ainsi en version brute (non réduite à 2 pages) cela donnait:


Historique et définition du concept traditionnel
La montagne est en France, selon l’Observatoire des Territoires de la DATAR , « une unité topographique, marquée par un relief prononcé dominant les plaines et piémonts environnants ». On distingue deux types de montagnes, selon leur âge : les vieux massifs hercyniens (Massif Central, Massif Armoricain, Morvan, Vosges, Ardennes et Corse) et les jeunes reliefs moins érodés (Alpes, Pyrénées et Jura).
Jusqu’à l’époque des Lumières, les montagnes sont des espaces naturels aux densités de populations plutôt faibles, où l’économie agricole et pastorale domine, dans un milieu perçu comme hostile et aux climats rigoureux. Bien que naturellement peuplées, pour certaines, par des populations sédentaires, quelquefois qualifiées d’indigènes à travers les continents, les civilisations occidentales urbaines ont commencé à les apprivoiser dès l’Antiquité, avec les Romains découvrant les eaux thermales à Luchon par exemple. C’est donc au milieu du 18e siècle que les scientifiques et artistes ont débuté l’exploration de la montagne et son idéalisation poétique. Puis, à partir de la révolution industrielle et suite aux progrès tout au long du 20e siècle, notamment la mobilité, se sont développées, d’une part, l’exploitation industrielle (bois de forêts et gisements miniers, puis énergie hydroélectrique et distribution de l’eau minérale), et d’autre part, l’exploitation touristique (cures thermales, sports d’hiver et sports d’été notamment), sans oublier, à une autre échelle, le commerce et l’artisanat.
C’est en agrégeant les différents secteurs économiques - primaire, secondaire et tertiaire - que l’on a pu établir le système de l’économie montagnarde.

Aspects juridiques : la loi « montagne » du 9 janvier 1985
Initialement du fait de politiques centralisées et sectorielles avec un Etat tantôt aménageur-entrepreneur, tantôt régulateur-financeur, les massifs montagneux français sont désormais gérés de manière intégrée par les pouvoirs décentralisés, fédérés autour des acteurs privés et des préfets coordonnateurs, dans le cadre d’une gouvernance partagée des comités de massifs. Ces instances de concertation et d’orientation œuvrent ainsi au maintien de la population, au développement durable, à la parité avec les autres territoires nationaux, et à la préservation de l’environnement. En effet, la loi « montagne » n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne a ajouté les massifs aux zones de montagne : ces nouvelles entités administratives sont au nombre de six (Vosges, Jura, Alpes, Massif central, Pyrénées et Corse) mais il n’y a que cinq commissariats de massifs, le cas de la Corse étant à part. Les massifs sont intégrés dans les Contrats de Plan Etat-Région et, depuis 1999, font l’objet d’une convention interrégionale de massif, permettant de dépasser le strict cadre régional.
Enfin, la loi « montagne » permit de recadrer un certain nombre de dispositions, notamment dans les codes de l’urbanisme, de l’environnement et du tourisme, avec par exemple la décentralisation des commissions d’Unités Touristiques Nouvelles, avalisant les projets touristiques des stations, qu’ils soient sur site vierge ou en discontinu, de nature immobilière sur plus de 8 000 m² de surface de plancher hors œuvre ou de création-extension du parc de remontées mécaniques dépassant un seuil de 4 M€.

Enjeux d’adaptation économique
Comme le suggère le sous-titre, l’économie montagnarde est en transition socio-économique entre les secteurs traditionnels en déclin - moins d’agriculteurs, déprise industrielle, vieillissement de la population et exode rural - et l’avènement du développement durable au service de la protection du patrimoine naturel, combiné à la concurrence des territoires sur un plan touristique, selon une segmentation marketing stratégique et en développant des moyens de communication performants (infrastructures de transports & NTIC ). Les secteurs en déclin ne sont pas uniquement spécifiques à l’économie montagnarde, il s’agit d’un phénomène structurel de fond qui touche la France de manière homogène, ce qui peut réduire l’inquiétude à son égard.
Limiter l’exode rural est un enjeu principal d’adaptation afin de perpétuer un modèle économique en partie alimenté par l’économie présentielle, où les résidents permanents et résidents secondaires génèrent des activités économiques simultanément aux besoins de services, soit une forme de croissance endogène. Malheureusement, c’est une économie partiellement ouverte, car non dédiée à l’export contrairement à l’économie productive, cette dernière étant le fruit des activités agricoles et industrielles. En 1982, l'emploi présentiel représentait 57 % du volume d'emplois dans la zone massif pyrénéenne ; en 2008, cette part s'élève à 73%. D'abord centrés dans les zones frontalières des Pyrénées centrales (territoires touristiques avec stations de ski) et en Cerdagne-Capcir, en 25 ans les emplois présentiels ont gagnés le piémont de ces zones, jusqu'en bordure du massif. L'Aude et les Pyrénées-Atlantiques, départements à forte tradition et production agricole, restent à l'écart de cette importante progression.
L’autre enjeu économique est d’éviter au maximum la dépendance aux saisons d’hiver et d’été, qui conditionnent les emplois saisonniers souvent précaires dans l’hôtellerie, les commerces et les loisirs, et qui exhortent à la polyvalence des métiers et des activités. Mais l’économie touristique, aussi périodique et séquencée dans le temps soit-elle, est un modèle de développement exogène à maîtriser, car elle rapporte un certain nombre de bénéfices par ricochets. Bien que plus onéreux que le tourisme balnéaire du fait du coût de l’équipement du skieur, de son hébergement, de la sécurisation des domaines skiables et de l’utilisation des remontées mécaniques, le tourisme de sports d’hiver reste cependant un tourisme de masse dont les territoires doivent s’efforcer de tirer les bénéfices. Le manteau neigeux mérite ainsi son appellation d’ « or blanc » car il contribue aux plus fortes dépenses annuelles en valeur absolue dans les économies montagnardes: à Luchon, l’adage veut que chaque euro dépensé dans les forfaits de remontées mécaniques se quintuple dans l’économie locale.

Spécificités par massifs français
Deux zones bénéficient d’atouts économiques diversifiés : les Alpes du Nord, par le tourisme et la dynamique de ses villes moyennes, et le Jura, par son industrialisation. Les Alpes du Nord hébergent notamment les industries du sport, des loisirs et de la montagne : les équipements de ski, de matériel d'alpinisme et de vêtements de montagne en Haute-Savoie, les dameuses et remontées mécaniques (Doppelmayr France) en Savoie mais aussi les skis et remontées mécaniques (Poma) en Isère. Ce demi-massif regorge également d’autres filières, historiquement liées aux synergies transfrontalières avec la Suisse et l’Italie: agroalimentaire et sylviculture, tradition artisanale de mécanique de précision, industrie lourde et fine, électronique et nanotechnologies, services.
Les autres massifs connaissent, en revanche, des difficultés économiques. Les Vosges, à l’image des déprises industrielles du Sillon Lorrain, sont en mutation industrielle, avec un fort exode rural et des emplois peu qualifiés. Concernant les Alpes du Sud, il ne s’agit pas de territoires historiquement industrialisés car ce sont avant tout des zones rurales peu denses s’appuyant sur le tourisme et leur secteur primaire, l’exception étant la métropole niçoise.
Les Pyrénées constituent le massif le moins homogène. La haute montagne en sa partie centrale est une zone de grand tourisme, essentiellement dans les Hautes-Pyrénées et la Haute-Garonne. La partie orientale bénéficie d'une activité touristique moins développée, d’autant plus que l’industrie est en déclin dans la majeure partie de l’Ariège et de l’Aude, et que les Pyrénées Orientales sont tournées vers le tourisme balnéaire et profite des synergies transfrontalières. Enfin, la partie occidentale est constituée de régions agricoles en difficulté, mais le département des Pyrénées Atlantiques compte sur l’agglomération paloise diversifiée pour asseoir son développement.
En dernier lieu, le Massif Central et la Corse semblent à l’écart, marqués par l’exode rural et un chômage globalement supérieur à la moyenne nationale. En effet, le Massif central est presque exclusivement constitué de régions agricoles en difficulté, souvent très enclavées. Quant à la Corse, elle est composée d'une partie centrale agricole en crise, entourée de zones urbaines et zones touristiques.

Focus sectoriel : l’aménagement de la montagne
Lorsque l’on évoque l’aménagement de la montagne, cela fait principalement référence à l’aménagement touristique. Comme énoncé plus haut, la mobilité, le temps libre, l’augmentation du pouvoir d’achat et les progrès technologiques notamment en termes d’infrastructures et moyens de transport sont les facteurs essentiels du développement du tourisme. Les destinations sont devenues de plus en plus accessibles, tant en termes de transport qu’en termes financiers, parmi lesquelles celles en montagne.
Dans la vitrine de l’aménagement de la montagne, l’on retrouve les stations de sport d’hiver, qui concentrent, sur une année, le plus de richesses déversées dans les économies locales, grâce à « l’or blanc ». Pour la plupart d’entre elles, il s’agit de constructions ex-nihilo sur sites vierges, éventuellement sur plusieurs communes : c’est l’artificialisation de l’espace montagnard. A l’origine, la pratique du ski est réservée à une élite et c’est par ses propres moyens que l’on fait les ascensions (ou rarement avec des téléphériques), avant l’avènement du téléski en 1936 à l’Alpe d’Huez, construit par Jean Pomagalski, qui donna son nom à la PME grenobloise actuellement numéro deux mondial du transport par câbles. Chamonix, Megève, La Clusaz, Barèges, Luchon-Superbagnères, Font-Romeu, Cauterets, Valloire, Val d’Isère entrent dans le club restreint des stations de ski de première génération et les hôtels sortent de terre au sein de ces villages et bourgs. C’est ensuite, durant les Trente Glorieuses où l’Etat agissait en aménageur-entrepreneur, que la plupart furent créées, sur un modèle fonctionnel urbain, à l’image de la première d’entre elles : Courchevel. Bâtie à l’initiative du conseil général de la Savoie et en partenariat avec des promoteurs immobiliers dès 1945, elle posa des principes d’aménagement repris par la majorité des stations : positionnement de la station en site vierge au bas du domaine skiable, ski aux pieds au bas des pistes, front de neige et « grenouillère », d’où partent les remontées mécaniques et où convergent les pistes selon un tracé en entonnoir. Puis viennent les « stations intégrées » de troisième génération avec en 1960 le « Plan neige », doctrine française d’aménagement de la montagne : maîtrise foncière, promoteur unique, priorité au ski alpin, domaine skiable orienté au nord, résidences construites sur les plateaux ensoleillés, parti d’urbanisme compact et fonctionnel séparant les skieurs des voitures, où l’architecture laisse souvent à désirer. C’est ainsi que les stations-villages de quatrième génération apparaissent, dans un style néo-rural. En outre, la technologie d’enneigement artificiel permet d’assurer une commercialisation minimum du domaine skiable, lors de manques ponctuels de neige.
Désormais, avec les nouveaux préceptes du développement durable et le changement climatique, doublés conjoncturellement par la lente sortie de crise économique, les stations de ski – syndicats d’aménagement et opérateurs exploitants - sont rentrées dans une nouvelle ère, à laquelle doivent s’adapter les filières liées, que sont les promoteurs et architectes, ainsi que les constructeurs et ingénieurs conseils en remontées mécaniques. Les nouveaux projets, nécessaires à la modernisation ou contribuant à la croissance de l’économie locale, sont quelquefois annihilés par les recours d’associations de protection de la nature mais aussi par des enveloppes financières insuffisantes. Pour diminuer, à juste titre, l’empreinte écologique des domaines skiables, le droit est de plus en plus contraignant, les dossiers de plus en plus volumineux et les temps d’instruction de plus en plus longs. En outre, certaines controverses cristallisent les oppositions, souvent féroces. De plus, bien que le réchauffement climatique ne soit quasiment plus contesté et que les stations doivent s’adapter en diversifiant leur offre, ce phénomène entraîne paradoxalement une augmentation des précipitations, donc ne remet pas en cause de futurs cas d’abondance de neige, comme l’excellente saison 2012/2013 dans les Pyrénées par exemple. Enfin, concernant l’aspect financier, les stations doivent recourir à des montages de plus en plus complexes, du fait de la raréfaction de l’argent public et/ou de recettes en baisse et de charges de plus en plus lourdes. Ce sont, une nouvelle fois de plus, les grandes stations, solides financièrement, qui s’en sortent le mieux dans ce genre de contexte, les pouvoirs publics procédant à une hiérarchisation des priorités. Il ne sera pas surprenant de voir disparaître les stations de basses altitudes, mais aussi les stations d’altitude convenable n’ayant pas assez de ressources.

Exemple Haut-Garonnais
En Haute-Garonne, notre territoire montagnard correspond peu ou prou à une partie du comté historique du Comminges, composé, du nord au sud, du plateau et piémont Commingeois autour de Saint-Gaudens (dans un losange Boulogne-sur-Gesse / Salies-du-Salat / Aspet / Montréjeau), du Cagire (dans un triangle Barbazan / Fronsac / Aspet), du Canton de St-Béat le long de la Garonne, et du Luchonnais aux confins de la vallée de la Pique, du Larboust et d’Oueil. Ces territoires bénéficient d’une gouvernance à grande échelle tant au niveau du Pays Comminges Pyrénées qu’au niveau de la Confédération Pyrénéenne du Tourisme, au-delà des communautés de communes.
Economiquement, notre territoire fait partie intégrante des Pyrénées Centrales où le tourisme hivernal et estival joue un grand rôle : hôtellerie-services-loisirs, Luchon « Reine des Pyrénées » étant en plus une ville thermale. Quatre stations de ski animent les hivers : les deux de taille moyenne Peyragudes et Superbagnères, la petite station du Mourtis et la micro-station de Bourg d’Oueil. L’été, c’est le canton de Luchon qui profite le plus des estivants, offrant la randonnée de haute altitude et autres sports d’extérieurs. L’agriculture, la sylviculture et le pastoralisme demeurent prégnants à toutes les altitudes même si il y a de moins en moins d’exploitants. Les quelques industries sont confinées sur le plateau Commingeois, comme l’usine de papier à St-Gaudens. Enfin, malgré l’exode rural, le vieillissement de la population et la polarisation des activités autour des pôles accessibles tels que Luchon, Montréjeau et St-Gaudens, la structure socio-économique du territoire montre des signes positifs avec l’économie présentielle, l’arrivée de jeunes actifs et le dynamisme du logement.

Peut-être ce texte appellera des réactions (positives et négatives j'en conviens, on n'est pas parfait !).

Ce message a été modifié par Pierre31 - 03 septembre 2014 - 01:30 .

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