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DMC des Grandes Rousses
L'Alpe d'Huez (Alpe d'Huez Grand Domaine Ski)
Poma



Description rapide :
Reportage sur le dernier DMC construit en France et retour sur l'histoire des remontées mécaniques qui ont fait les Grandes Rousses.
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Reportage sur le dernier DMC construit en France et retour sur l'histoire des remontées mécaniques qui ont fait les Grandes Rousses.
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- Gare intermédiaire

Auteur de ce reportage : benj
Section écrite le 16/05/2011 et mise à jour le 13/12/2012
(Mise en cache le 22/08/2013)
Sommaire :
- L'Alpe d'Huez : présentation et historique
- L'épopée des téléphériques des Grandes Rousses
- La télécabine des Grandes Rousses
- De la télécabine au DMC des Grandes Rousses
- Le DMC des Grandes Rousses : présentation et situation
- La gare aval
- La ligne : premier tronçon
- La gare intermédiaire
- La ligne : deuxième tronçon
- La gare amont
- Les cabines et le système d'accroche au câble
- Le DMC des Grandes Rousses vu depuis les pistes
- Conclusion
L'Alpe d'Huez : présentation et historique
L'Alpe d'Huez est une station de sports d'hiver et d'été répertoriée station climatique, située en Isère, au cœur de l'Oisans. Elle est la station centrale du domaine skiable du massif des Grandes Rousses qui réunit autour d'elle les stations d'Auris-en-Oisans (les Orgières), de Villard-Reculas, d'Oz-en-Oisans (l'Olmet) et de Vaujany sous l'appellation commerciale Alpe d'Huez Grand Domaine depuis 2010.
L'espace de ski de l'Alpe d'Huez s'étend entre le village d'Huez, situé à 1500m d'altitude et le sommet du Pic du Lac Blanc à 3330m d'altitude, soit 1830m de dénivelé qu'il est possible de dévaler d'une traite.
L'Alpe d'Huez s'est installée sur les alpages du village d'Huez-en-Oisans à 1860m d'altitude. Si les premiers skieurs fréquentaient le village dès 1911, l'Alpe d'Huez a commencé véritablement à se développer à partir de 1935, grâce à la modernisation de la route d'accès à Huez et à la construction de la route entre Huez et son Alpe. L'année suivante, c'est l'électricité qui fit son arrivée à l'Alpe, jusqu'au chalet du Touring Club de France, au lieu-dit "les Jeux", jonction entre les pentes du Signal d'Huez et des Grandes Rousses à 1860m d'altitude. Ces deux événements combinés vont initier le développement de la station en permettant aux pionniers d'acheminer facilement les matériaux nécessaires à l'équipement en hôtels et remonte-pentes. Ainsi, lorsque l'Alpe d'Huez est devenue une station de ski en 1936, elle comptait 3 hôtels et déjà 2 téléskis sur la douzaine existant en France cette même année. Le mythe était déjà en marche.
Face au succès rencontré, les investisseurs privés poursuivirent l'extension du domaine skiable avec la création de nouveaux téléskis dans les années 40. Développement privé qui trouva son apogée au début des années 50 avec la construction des deux premiers tronçons des téléphériques des Grandes Rousses, chargés de symbole et première étape d'une chaîne de téléphériques qui devait mener à terme au sommet du Pic du Lac Blanc, à 3330m d'altitude.
Mais rapidement l'investissement privé va montrer ses limites : une faible capacité d'investissement et d'endettement empêchant la modernisation ou l'extension de l'existant, une rentabilité hasardeuse, parfois même la surfréquentation sur certains appareils. Les premiers signes de faiblesse de ce mode de gestion apparaissent, et persistent de reprise en reprise. C'est alors qu'en 1958, après 4 saisons d'exploitation non rentables, après plusieurs incidents légers et des pannes sérieuses, le propriétaire des téléphériques abandonna leur exploitation.
Ce dernier événement historique a conduit à la création de la SATA (Société pour l'Aménagement Touristique de l'Alpe d'Huez) dont la première mission était d'assurer la remise en route et l'exploitation des téléphériques des Grandes Rousses déjà devenus indispensables pour le bon fonctionnement de la station.
Réunis autour de la SATA, devenue l'interlocutrice privilégiée du développement du domaine skiable, des commerçants, des hôteliers et des habitants de la station vont alors pouvoir montrer très vite leur force et leur capacité d'investissement. Ainsi depuis sa création le 20 octobre 1958, il ne s'est pas passé une année sans que la SATA n'investisse sur le domaine skiable. Investissements qui ont consisté, dans un premier temps, à racheter les installations existantes et à en construire de nouvelles, étendant ainsi le domaine skiable sur le territoire d'Huez d'abord puis à ses voisins ensuite. Avec l'augmentation de la fréquentation, l'agrandissement de la station et la nécessité de garantir un enneigement durable, les investissements ont porté dans un second temps sur l'équipement en neige de culture et l'amélioration des liaisons dans la station et à l'intérieur du domaine skiable. Depuis quelques années les investissements portent essentiellement sur la modernisation des équipements et l'amélioration de la sécurité des pistes.
Plus de cinquante ans d'évolution résumés par ces faits marquants de l'histoire de la SATA et du domaine skiable Alpe d'Huez Grand Domaine :
- la construction du troisième tronçon du téléphérique des Grandes Rousses par Neyrpic entre 1960 et 1962, un appareil ultra moderne, le plus grand du monde à l'époque ;
- la liaison vers le domaine skiable d'Auris en 1971 puis son exploitation à partir de 1973 ;
- la transformation des deux premiers tronçons du téléphérique des Grandes Rousses en télécabine débrayable moderne en 1975 ;
- la profonde mutation de la station et l'amélioration de la desserte du domaine en 1986 : DMC des Grandes Rousses, TCD Marmottes 1, TSF Eclose, Bergers et Romains ;
- l'ouverture du domaine skiable aux nouvelles stations d'Oz-en-Oisans et de Vaujany entre 1987 et 1989 ;
- la finalisation du deuxième accès au domaine d'altitude avec la construction de Marmottes 2 en 2000 et de Marmottes 3 en 2003-2004 superbement conclu par le remplacement de Marmottes 1 en 2009.
L'épopée des téléphériques des Grandes Rousses
Le projet des Grandes Rousses trouve son origine à la fin des années 40.
A cette époque, la zone desservie par les remontées mécaniques s'étend entre Signal, Huez, Eclose et Lac Blanc, comme le représente cette illustration de ce qu'aurait pu être le plan des pistes entre l'hiver 1948 et l'hiver 1954 :
Les commerçants et hôteliers de la station souhaitent voir le domaine skiable s'étendre en direction de la chaîne des Grandes Rousses. Le potentiel ski y est immense et rendrait la station très attractive tout en accroissant son développement. Deux téléphériques sont alors envisagés : ce type d'appareil présente l'avantage de franchir les obstacles naturels du site sur des distances plus longues qu'avec des téléskis et dans un confort relativement meilleur.
Mais un problème de taille se pose pour la réalisation de ce projet : le financement qui était largement supérieur à tout ce qui avait déjà été réalisé dans la station jusqu'à présent. Pour aller au bout de ce projet, une initiative collective nait en 1950 sous la forme d'un regroupement d'une grande partie des commerçants et hôteliers de la station. La Société d'Expansion de l'Alpe d'Huez créée pour l'occasion avait pour unique objectif de préparer la construction des deux téléphériques des Grandes Rousses entre 1860 et 2100 pour le premier et entre 2100 et 2700 pour le second.
Deux années de démarches seront nécessaires avant le démarrage des travaux pendant lesquelles la société obtient les autorisations de la mairie, la garantie du futur prêt par le Conseil Général de l'Isère et délègue la gestion du projet à M. Slaihler, un banquier ancien propriétaire du TKE du Signal.
Ce dernier commence par préparer les aspects logistiques mais en 1952, le conseil d'administration de la société d'expansion se ravise et choisit de donner délégation à un entrepreneur de Toulon, M Vidal dont la candidature parait plus fiable. C'est lui qui trouvera le financement de 130 millions de francs auprès de trois assureurs et qui confiera les travaux à l'entreprise Monziès.
L'entreprise Monziès qui réalisa ces téléphériques construisit également en 1952 le téléphérique de Bellevarde à Val d'Isère. Cette société construira plus tard un dernier appareil en 1963 : le funiculaire de l'Aven Armand situé dans le Massif Central.
Commencés en 1952, les travaux dureront deux ans et feront travailler environ 120 personnes. Les premières pièces étaient d'abord acheminées par des engins militaires puis par les hommes jusqu'au sommet de Grandes Rousses 2. Le chantier était difficile et fut ponctué par la mort d'un grutier en 1953.
A l'inauguration des téléphériques le 12 octobre 1954, la société est dissoute et la gestion intégrale de la concession foncière et de l'exploitation du téléphérique revient à M. Vidal.
Voici quelques caractéristiques de ces deux appareils lors de l'inauguration en 1954 :
Caractéristiques administratives :
- TPH - Téléphérique bicâble à va et vient : GRANDES ROUSSES 1 ET 2
- Exploitant : Monsieur Vidal
- Constructeur : Monziès
- Années de construction : de 1952 à 1954
- Saison d'exploitation : hiver et été
- Capacité : 43 personnes
- Débit : 430 | 350 personnes/heure
- Vitesse d'exploitation : environ 8 m/s
- Temps de montée total : environ 15 minutes
- Altitude gare aval : 1861m | 2108m
- Altitude gare amont : 2108m | 2614m
- Dénivellation : 147m | 506m
- Longueur développée : 1486m | 2064m
- Station motrice :
- Station de tension :
- Type de tension :
- Nombre de pylônes : 3 | 3
Quelques photos noir et blanc des premières années d'exploitation :
La ligne de Grandes Rousses 1 dans son intégralité
La première partie de la ligne de Grandes Rousses 1
Vue sur la ligne de Grandes Rousses 1 depuis la G2
L'intermédiaire à 2100 : G2 de Grandes Rousses 1 et G1 de Grandes Rousses 2
La ligne de Grandes Rousses 2 dans son intégralité
La première partie de Grandes Rousses 2
La ligne de Grandes Rousses 2 vue depuis la G2
Vue sur la G2 de Grandes Rousses 2
Détail d'un pylône portique
Détail d'une cabine
Très vite les clauses du contrat de prêt vont s'avérer très problématiques. En effet, l'une d'entre elle prévoyait que si le chiffre d'affaire de la première année d'exploitation n'atteignait pas 20 millions de francs, l'emprunteur devait payer un intérêt supplémentaire de 9% sur le chiffre d'affaire. La première année, il fut de 18 millions de francs. L'objectif n'était pas atteint et cela plombera durablement les finances de M. Vidal.
A cette première grosse difficulté, s'ajoutèrent quelques incidents d'exploitation dont une défaillance grave détectée sur les câbles tracteurs provoquant plusieurs pannes et l'évacuation verticale des passagers. M. Vidal n'ayant pas les finances nécessaires à la réparation des téléphériques, il cesse son activité durant l'hiver 1958.
Ces événements seront à l'origine de la création de la SATA en octobre 1958 dont la première urgence était de racheter les téléphériques à leur propriétaire, de les remettre en fonctionnement, de les exploiter et de reprendre le prêt initial à sa charge.
Quelques photos couleur de ces appareils, après reprise de la SATA, par ordre chronologique des prises de vue :
La ligne de Grandes Rousses 2, dans le fond on reconnait le Signal de l'Homme
Le haut de Grandes Rousses 2 et le téléphérique du Pic Blanc
L'accès à 1860
Détail de la G1 de Grandes Rousses 1
La G1 de Grandes Rousses 1 entre les téléskis triples des Jeux et du Signal
La télécabine des Grandes Rousses
La saison d'hiver 1975 débute. La station s'est considérablement étendue et le domaine skiable aussi, il est désormais relié à celui de la nouvelle station des Orgières (Auris-en-Oisans) depuis trois ans.
Sur cette illustration de ce qu'aurait pu être le plan des pistes 1974-1975, on remarque que les deux téléphériques et les pistes qu'ils desservent sont des incontournables dans le domaine skiable. Ils sont le passage obligé pour l'accès au Pic Blanc à partir duquel on peut soit profiter du panorama grandiose, soit s'engager sur des pistes difficiles (Tunnel, Brèche) ou sur de longs itinéraires hors-pistes (Château Noir, Sarenne).
Cependant le débit des téléphériques n'est pas suffisant, ils ont donc été renforcés au fil du temps par les téléskis des Jeux sur le premier tronçon puis par les TSF2 Plates et Lièvre Blanc sur le deuxième tronçon. Des soutiens pas toujours très efficaces en période de forte affluence mais en ce début de saison, on ne pense pas encore à remplacer les vieux téléphériques.
Pourtant un événement terrible survenu en cours de saison va sonner le glas de ces appareils anciens : le 18 mars 1975, vers 15h30, une cabine de Grandes Rousses 2 chargée de passagers monte en direction de 2700.
Alors qu'elle s'approche du pylône 2 de la ligne et qu'elle se trouve au milieu de son parcours, la cabine se décroche du câble tracteur. N'étant retenu par aucun système, le chariot de la cabine va alors rouler sur le câble porteur sur près de 1000m à une vitesse avoisinant les 90km/h.
Par chance, la cabine s'immobilise peu après avoir décollé au passage du pylône 1, son chariot s'est coincé sur le câble porteur, lui évitant ainsi d'aller se fracasser en G1.
Si aucun blessé n'est à déplorer lors de cet incident, il n'en demeure pas moins que les passagers de la cabine ont eu très peur, et la SATA aussi. Il est ausitôt décidé d'arrêter définitivement l'exploitation des deux téléphériques Monziès.
A la SATA les choses se précipitent car le délai est court pour équiper la station d'un appareil de remplacement avant l'hiver 1976. Le 29 mars, il est décidé de remplacer les téléphériques par une télécabine débrayable au débit et au confort nettement supérieurs ; le 19 avril, le devis est établi ; le 20 mai, la démolition des téléphériques débute, elle s'achèvera en juin.
Pour la nouvelle télécabine, le tracé retenu est le même que celui des téléphériques. Le choix de la SATA porte sur une télécabine 6 places ultra-moderne du constructeur Poma, dont le premier exemplaire construit deux ans plus tôt à Villard de Lans faisait sensation. L'appareil est construit en deux tronçons et dispose d'une gare intermédiaire située à 2100, celle-ci effectuant un léger virage à gauche. Les bâtiments abritant les gares son refait à neuf, en G1 on y intègre même les locaux flambant neuf de la SATA.
Si le type d'appareil n'est pas une première en soit, la construction de cet appareil va apporter une nouveauté qui influencera les futurs téléportés de Poma. Jusqu'à présent, Poma équipait ses téléportés de pylônes treillis. Pour la télécabine des Grandes Rousses, Poma va tester un nouveau type de pylône : les pylônes caissonnés. On retrouve ces pylônes sur l'intégralité du premier tronçon et sur environ la moitié du deuxième tronçon, le reste étant constitué de pylônes treillis classiques.
Si cette expérience ne sera pas renouvelée, elle conduira Poma tout droit vers la conception de pylônes tubulaires pour ses téléportés. Des pylônes encore utilisés actuellement par tous les constructeurs.
Les caractéristiques de cette télécabine sont les suivantes :
Caractéristiques administratives :
- TCD - Télécabine à attache débrayable : GRANDES ROUSSES
- Exploitant : SATA
- Constructeur : Poma
- Année de construction : 1975
- Saison d'exploitation : hiver et été
- Capacité : 6 personnes
- Débit : 1800 personnes/heure
- Vitesse d'exploitation : 4,5 m/s
- Temps de montée : 5 min
- Altitude gare aval : 1860m
- Altitude gare intermédiaire : 2106m
- Altitude gare amont : 2613m
- Dénivellation : 753m
- Longueur développée : 3550m
- Station motrice : amont
- Station de tension : amont
- Type tension : contrepoids situé entre les deux derniers pylônes
- Sens de montée : droite
- Nombre de pylônes : 13 + 21
- Type de véhicule : cabine 6 places Sigma de première génération
- Type d'attache au câble : double pince S
Place aux photos présentées ici dans le sens de la ligne :
La G1 de la télécabine dans son environnement
Une cabine en sortie de gare aval
La ligne du premier tronçon est intégralement constituée de pylônes caissonnés
A l'approche de la G2, c'est dans cette gare intermédiaire que se situe le garage
Vue sur le premier tronçon depuis la G2
Entrée d'une cabine en G2, on reconnait juste derrière le bâtiment deux des trois téléskis des Jeux
Le deuxième tronçon dans son intégralité
Vue sur le deuxième tronçon en sortie de G3
La ligne depuis les deux derniers pylônes du deuxième tronçon, on distingue nettement le contrepoids
Les deux derniers pylônes depuis la G4
La G4 de profil, vue depuis le Lac Blanc
D'autres vues de cette télécabine :
De la télécabine au DMC des Grandes Rousses
Onze années après la construction de la télécabine, bien des choses ont évolué.
D'une part la station s'est agrandie considérablement et sa capacité d'accueil va encore augmenter de manière importante les années suivantes avec notamment l'arrivée des clubs de vacances. D'autre part, s'il n'a pas beaucoup évolué en onze ans, le domaine skiable va être presque doublé sur les trois années à venir grâce à la création des stations de Vaujany et de l'Olmet (Oz-en-Oisans) voire même triplé ou plus avec le projet de liaison avec la station des Deux Alpes qui semble se préciser.
Au regard de ces éléments et pour anticiper les choses, la station va apporter des transformations de fond sur son domaine skiable et ce dès 1986 car il convient d'améliorer le débit global sur le domaine et de desservir les nouveaux quartiers de l'Eclose et des Bergers
La chaîne d'accès des Grandes Rousses va prendre un rôle central dans le domaine skiable à l'avenir et devenir incontournable pour rejoindre les futures stations de Vaujany et de l'Olmet. Le débit de cet axe stratégique doit donc être augmenté, il va en fait presque doubler puisque la TCD6 sera remplacée sur un tracé strictement identique par un DMC au débit encore jamais atteint en France de 3000 personnes par heure et sera déplacée sur le front de neige des Bergers et deviendra la TCD6 Marmottes 1 entre 1986 et 2010.
Les travaux sont lourds et multiples pendant l'été 1986 mais tous les appareils commandés à Poma seront prêts pour l'ouverture de la saison 1987.
Voici quelques photos rares de la construction du DMC et de sa première saison d'exploitation :
La G1 du DMC lors de sa construction pendant l'été 1986
La G1 dans sa livrée d'origine
La gare intermédiaire vue depuis le deuxième tronçon, la télécabine du Poutran n'existe pas encore et les téléskis des Jeux ne sont pas équipés de LSP
La ligne du DMC en haut du mur des Chamois
La ligne du deuxième tronçon vue depuis le haut de la G4, on distingue le TSF2 Plates sur la droite
Le DMC des Grandes Rousses : présentation et situation
Construit par Poma en 1986, le quatrième appareil des Grandes Rousses reprend exactement le tracé de la télécabine qu'il remplace. La technologie DMC a un fonctionnement proche d'une télécabine débrayable classique à la différence que les cabines sont accrochées à un double câble porteur-tracteur améliorant leur tenue au vent. La répartition de la charge sur ce double câble permet également d'augmenter le dimensionnement des cabines et donc le débit global de l'appareil.
Le DMC des Grandes Rousses est construit sur deux tronçons au fonctionnement lié. Il s'agit donc d'un seul appareil sur lequel il est malgré tout possible de ne faire circuler les cabines que sur le premier tronçon. Ce fonctionnement oblige toutefois l'exploitant à faire rouler le câble à vide sur le deuxième tronçon non utilisé ce qui augmente sensiblement les risques de déraillement du câble là où aucune charge n'est présente. C'est pour cette raison que cette possibilité n'a jamais été exploitée par la SATA jusqu'à présent, cette dernière préférant à juste titre fermer totalement l'installation si les conditions sûres d'exploitation ne sont pas réunies sur la totalité du parcours.
Le DMC des Grandes Rousses est le dernier DMC Poma construit dans le monde. En France, 5 autres appareils de ce type ont été construits par Poma en 1984 (DMC20 du Pontillas à Serre-Chevalier et DMC20 du Bettex à Saint-Gervais Mont-Blanc) et en 1985 (DMC23 des Grandes Platières à Flaine et les deux DMC20 du Jandri Express 1 et 2 aux Deux-Alpes). Un peu plus tard, le constructeur italien Agudio a construit deux appareils de ce type en Italie : le DMC25 des Suches à La Thuile en 1988 et le DMC25 Europa à Arabba dans les Dolomites. Un dernier appareil au fonctionnement très proche du DMC a également été construit par Doppelmayr en 1988 : le DLM24 Gaislachkogbahn de Sölden.
A la différence de certains de ses collègues français, le DMC des Grandes Rousses n'a pas été adapté sur la ligne d'un appareil existant. Tous ses éléments sont donc neufs y compris ses pylônes qu'il faudra créer de toute pièce. Pour ne pas reproduire des pylônes disgracieux comme ceux des DMC des Deux-Alpes, Poma va s'appuyer sur la compétence du cabinet Creissels dans le domaine des remontées mécaniques pour leur conception. Il en résulte un assemblage de tubes caissonnés presque simpliste.
Les cabines du DMC quant à elles peuvent transporter jusqu'à 25 passagers ce qui est supérieur aux autres modèles français. Leur couleur noire et leur forme arrondie unique leur donne une apparence très moderne pour l'époque. Pour leur réalisation, Poma a fait appel au carrossier Sigma avec qui il travaille régulièrement pour ses télécabines.
Ces deux éléments au design réussi et constituant sa partie visible font paraître le DMC des Grandes Rousses comme l'appareil le plus abouti de sa catégorie.
Comme pressenti lors de sa construction, le DMC des Grandes Rousses a aujourd'hui un rôle central dans tout le domaine skiable du massif. Il dessert le tiers des pistes du domaine, il est le passage obligé pour l'accès au Pic Blanc depuis les Jeux et le passage presque obligé pour l'accès à Vaujany et à Oz. Il est également le mieux adapté pour rejoindre la liaison avec Auris toujours depuis les Jeux.
Situation du DMC sur le front de neige des Jeux en 2011 : à gauche le TKD Lac Blanc, à droite les 3 TKD Jeux, derrière les 3 TKD et TSF4 Signal et le TCP Télécentre
Côté pistes, le DMC dessert directement de nombreuses pistes :
- au départ de 2700 : couloir et chamois en direction de l'Alpe et les rousses en direction d'Oz et Vaujany via l'Alpette ;
- au départ de 2100 : les pistes chavannus, poutran et boulevard de lutins en direction d'Oz et une ribambelle de pistes vertes en direction de l'Alpe : chardons, piste de bob, babars, sagnes, jeux, premier tronçon, retour bergers, centrale et l'espace nouvelles glisses du Lac Blanc.
La situation du DMC des Grandes Rousses sur le plan des pistes saison 2010/2011 :
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Les caractéristiques de l'appareil en 2011
Caractéristiques administratives :
- DMD - Double monocâble à attache débrayable : GRANDES ROUSSES
- Exploitant : SATA
- Constructeur : Poma
- Année de construction : 1986
- Saison d'exploitation : hiver et été
- Capacité : 25 personnes
- Débit : 3000 personnes/heure
- Vitesse maximale d'exploitation : 6 m/s
- Temps de montée : 14 min
- Altitude gare aval : 1860m
- Altitude gare intermédiaire : 2106m
- Altitude gare amont : 2613m
- Dénivellation : 753m
- Longueur développée : 3550m
- Pente moyenne : 22%
- Pente maxi : 31%
- Station motrice : aval
- Station de tension : amont
- Type de tension : hydraulique
- Sens de montée : droite
- Nombre de pylônes : 10
- Nombre de véhicules : 54
- Type de cabine : cabine 25 places Sigma
La gare aval
La gare aval du DMC se situe sur le front de neige des Jeux à côté des locaux de la SATA. C'est dans cette gare que se trouve la motrice de l'appareil.
A l'approche de la G1 depuis la piste jeux :
L'accès à l'embarquement se fait par un escalier :
Arrivée d'une cabine en G1, elle dessert d'abord une petite zone de débarquement des passagers descendant et sert également à l'embarquement des personnes à mobilité réduite :
Après avoir embarqué tous ses passagers, la cabine est prête au lancement :
Une cabine dans le lanceur :
La ligne : premier tronçon
Le premier tronçon suit une pente douce et régulière jalonné par 5 pylônes de ligne tous en support.
La configuration des pylônes sur ce tronçon est la suivante (brin montant/brin descendant, sur un même brin les deux trains de galets sont identiques) :
G1 : 12C
P1 : 12S
P2 : 12S/8S
P3 : 12S/8S
P4 : 12S
P5 : 12S
G2 : 8S
En sortie de G1, de gauche à droite et sur l'intégralité du premier tronçon on trouve les téléskis des Jeux et les pistes jeux et 1er tronçon :
A l'approche du premier pylône de ligne, détail de la potence :
Le pylône 2, comme tous les autres est constitué de 3 tubes reliés en leur centre et formant une pyramide au-dessus de laquelle est fixée la potence :
A l'approche de la G2, le carrefour des pistes de 2100 :
La gare intermédiaire
La gare intermédiaire dans son environnement :
Nous voici en gare intermédiaire, la ligne effectue ici un léger angle sur la gauche qu'on devine sur cette photo :
C'est en gare intermédiaire que se trouve le garage du DMC, les cabines sont stockées derrière ces palissades en bois, on y trouve une petite zone d'entretien :
A l'emplacement de la cabine 51 se trouve un aiguillage permettant à l'exploitant de ne faire tourner les cabines que sur le premier tronçon :
Derrière ces deux cabines se trouve la petite zone de débarquement/embarquement du brin descendant :
Détails d'une chaîne de trainage :
Les portes sont fermées, la cabine est prête à s'élancer sur le deuxième tronçon :
Hors exploitation, le bâtiment est fermé par de lourdes portes en tôles :
Le pylône de sortie de gare, un 16C :
Diverses vues de la gare intermédiaire depuis l'extérieur :
La ligne : deuxième tronçon
Sur le deuxième tronçon, le parcours est plus long et commence en pente faible avant de franchir un obstacle naturel entre les P5 et P6. A partir du P6, la pente est forte mais régulière. Sur ce tronçon la ligne est soutenue par 5 pylônes.
La configuration des pylônes est la suivante :
G3 : 16C
P6 : 12S
P7 : 12S
P8 : 8S/6S
P9 : 12S/8S
P10 : 12S
G4 : 12S
Peu après la G3 se trouve l'imposant P6 équipé de renforts supplémentaires car sa base se situe en dévers :
Nous voici dans la plus longue et la plus haute portée de la ligne entre les P6 et P7, sur la gauche l'itinéraire de ski de fond des lacs et sur la droite la piste chamois :
Au survol le plus haut de la ligne, les cabines descendantes ont tendance à tanguer fortement dans cette portée :
Le P7 est lui aussi équipé de renforts supplémentaires :
Nous voilà au-dessus de la piste chamois :
Les pylônes 7, 8 et 9 sont plutôt rapprochés :
Dans la deuxième plus longues portée de la ligne où là encore les cabines descendantes tanguent :
A nouveau nous survolons la piste chamois :
A l'approche du dernier pylône nous passons au-dessus de la piste des rousses :
Dans la dernière portée, tout à gauche on voit la piste belvédère qui descend du Dôme des Petites Rousses :
La structure de la G4 est très imposante :
Le terme 2700 est largement usurpé puisque l'altitude réelle de la G4 est de 2613m :
La gare amont
La gare amont du DMC des Grandes Rousses est chargée de la tension de la ligne. Elle se situe au carrefour des pistes et remontées mécaniques de 2700.
Dans le ralentisseur, à gauche du bâtiment on voit les contrepoids servant à la tension du téléphérique du Pic Blanc qui jouxte le DMC :
Prêt au débarquement :
Une cabine dans le contour plutôt réduit de cette G4, :
Aucune distinction n'est faite entre les zones de débarquement et d'embarquement :
L'accès au DMC se fait de plain-pied :
Diverses photos de la G4 depuis l'extérieur :
Les cabines et le système d'accroche au câble
Le DMC des Grandes Rousses est équipé d'environ 54 cabines de 25 places chacune et fabriquées par Sigma. Pour une meilleure stabilité de l'ensemble, la suspente n'est pas très longue.
Une cabine en ligne :
Une cabine au passage d'un pylône :
Détail d'une pince :
Le DMC des Grandes Rousses vu depuis les pistes
Conclusion
Depuis son implantation en 1986, le DMC n'a pas subit de modification fondamentale. Avec l'augmentation de la fréquentation de la station, son très haut débit d'origine s'est avéré bien adapté. Même s'il peine à absorber un flux important de skieurs pendant les périodes de forte affluence, le DMC des Grandes Rousses ne montre aujourd'hui pas de signe de faiblesse et a passé sa grande inspection avec brio.
Aucun projet de remplacement n'est donc à l'ordre du jour et comme pour les téléphériques en leur temps, c'est la piste du débit des remontées mécaniques installées autour de lui qui sera vraisemblablement étudiée pour mieux absorber les flux au départ du front de neige.
Mais si un jour il devait être remplacé, le DMC des Grandes Rousses pourrait laisser sa place à un appareil au débit supérieur et à une meilleure tenue au vent. Dans ces conditions, on peut imaginer qu'un 3S remplirait parfaitement ce rôle.
Texte et photos (décembre 2010) : Benjamin Cereghetti
