FUNI 38 du Capucin
Le Mont-Dore (Le Sancy)
Autres constructeurs
Le plus vieux funiculaire à traction électrique de France. Un patrimoine historique à l’indéniable charme Belle Époque.
Année de construction : 1898
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Funiculaire du Capucin Le Mont-Dore
Il y a 115 ans, on inaugurait au Mont-Dore, en Auvergne, le funiculaire du Capucin, premier funiculaire de France à recourir à l’énergie électrique. Grâce aux choix techniques audacieux opérés par ses concepteurs, l’appareil gravit encore de nos jours sans modification profonde, les contreforts de cet ancien dôme volcanique qui domine la ville. Plus qu’une remontée mécanique, c’est un véritable patrimoine historique à l’indéniable charme Belle Époque que je vous propose de découvrir au travers de ce reportage.
Le Mont-Dore et son funiculaire
La station thermale du Mont-Dore
Au cœur de l’Auvergne, à la naissance de la Dordogne, le Mont-Dore est une des deux principales stations de ski du massif du Sancy. Sous l'impulsion de Dieudonné Costes, le site se voit équipé dès 1936 d'un premier téléphérique donnant accès à l'antécime du Puy de Sancy, point culminant du Massif central. Mais le Mont-Dore est aussi une station thermale réputée pour ses eaux depuis l’époque gallo-romaine. C'est au XIXe, grâce au travail urbanistique opéré par l’architecte Louis-Charles Ledru, à la manière du baron Haussmann à Paris, que la station se dessine dans sa physionomie contemporaine. Un nouvel établissement d’eaux est inauguré en 1832 puis agrandi en 1850 ; la place du Panthéon est aménagée et le cours de la Dordogne est dévié pour laisser place à des hôtels de charme. En parallèle, les infrastructures nécessaires au confort des baigneurs se développent les unes après les autres : on inaugure en 1878 le bureau de poste et quatre ans plus tard, le casino, qui, outre la salle de jeux, dispose également d’une salle de spectacle et d’un salon de danse. Le développement se poursuit sous l’égide de Jean Chabaud, concessionnaire de l’établissement thermal, qui ambitionne de faire du Mont-Dore « une des plus grandes stations balnéaires de France » et inaugure en 1994 un nouvel établissement thermal qui sera encore agrandi au XXe siècle par l’architecte Louis Jarrier, qui laisse au Mont-Dore son emprunte sur une multitude de constructions.
Dès 1899, la station thermale bénéficie d’une desserte ferroviaire en devenant le terminus de la ligne de la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans qui la relie à Laqueuille. Pour autant, la première voie ferrée du Mont-Dore est mise en service un an plus tôt : il s’agit du funiculaire du Capucin qui naît grâce à la volonté de Jean Giraudon, entrepreneur de travaux publics à Perrier, dans la région d’Issoire, déjà promoteur des établissements thermaux de Saint-Nectaire-le-Bas.
Un plan de la vallée du Mont-Dore avec le tracé du funiculaire du Capucin. (Coll. Laurent Berne)
La remontée conduit au Salon du Capucin, à 1 245 mètres d'altitude, sur un plateau qui domine, à l'ouest, la ville du Mont-Dore de 200 mètres. Le lieu est situé sur les contreforts du pic du Capucin, un éperon rocheux emblématique, culminant à 1 468 mètres, qui doit son nom à sa forme arrondie qui avait jadis évoqué à certains une silhouette de moine encapuchonné aux mains jointes en prière.
Une vue large sur la ville du Mont-Dore, le Capucin et le funiculaire. (Coll. Laurent Berne)
Un équipement précurseur
Jusque-là, que ce soit à Lyon (Rue Terme-Croix Rousse - 1862 ; Saint-Just - 1878 ; Croix Paquet - 1891), Thonon-les-Bains (Rives - 1888), Rouen (Bonsecours - 1892), Meudon (Bellevue - 1893), ou Marseille (Notre Dame de la Garde - 1893), les funiculaires existants sont essentiellement construits sur une colline ou une bute urbanisée au cœur même, ou à proximité, d'une grande agglomération. Le funiculaire du Capucin est ainsi, après le funiculaire de la Chaumière à Luchon (1894-1970), le second moyen de transport par câble français à vocation touristique à être installé au cœur d'un massif de montagne.
La ligne du funiculaire du Capucin, première voie de chemin de fer au Mont-Dore en 1898,
un an avant la ligne de la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans. (Coll. Laurent Berne)
Le funiculaire du Capucin permet aux curistes qui viennent au Mont-Dore pour soigner leurs troubles respiratoires, de profiter sans effort des « bienfaits de l’air pur » des hauteurs par des promenades faciles et ombragées. En effet, en vallée, le sol rocheux du Mont-Dore n'est pas propice au développement d'une végétation arborescente ; aussi les promenades à plat et à l'ombre demeurent rares à proximité de l’agglomération. Au contraire, sur le long plateau du Capucin, un superbe bois de hêtres et de sapins séculaires permet des marches agréables.
On monte également au Salon du Capucin pour profiter d'un moment de détente au café-restaurant, sur « un salon champêtre au parquet de gazon, entouré de beaux arbres, où les malades peuvent boire du lait ou du sirop, et les bien portants des boissons un peu moins douces ».
Plan des promenades à faire depuis la gare d'arrivée du funiculaire. (Coll. Laurent Berne)
Le premier funiculaire électrique de France
Le funiculaire et l'usine hydroélectrique
La réalisation du funiculaire trouve sa concrétisation grâce à un autre projet initié en 1891 par cinq propriétaires du Mont-Dore, MM. Tardieu, Bellon, Ramade, Sarciron et Tardif : la construction de l'usine hydroélectrique de La Compissade sur la Dordogne, au lieu-dit La Fontaine Pétrifiante, destinée à alimenter en énergie électrique la ville, une zone d’industries et... un « tramway électrique ».
La prise d’eau doit être installée à 2,2 kilomètres en aval de la ville au niveau où la Dordogne reçoit le ruisseau de l’Enfer, qui, alimenté par le lac de Guéry, peut fournir un débit de 600 litres par seconde garantissant la production en toutes saisons. On réalise d'ailleurs à cet effet en 1894 un barrage sur le lac, avant-même que le projet d'usine de production ne soit finalisé.
(fond de plan Geoportail)
Ce projet d'usine de production électrique du Mont-Dore inspire en 1892 Albert-Léon Levy-Lambert, connu pour ses travaux de référence relatifs aux funiculaires et aux premiers téléphériques. L'ingénieur trouve « tout indiqué de songer à relier à la localité par un funiculaire, ce parc naturel appelé le Salon du Capucin » et réalise un avant-projet. Le profil convexe de la ligne prévue s'écarte du profil d'équilibre, ce qui rend difficile l'application d'un fonctionnement par contrepoids d'eau. Porté par les succès des expériences suisses où l'on s'essaye, depuis 1888, à l’énergie électrique sur quelques funiculaires, Albert-Léon Levy-Lambert propose d'équiper l'appareil du Mont-Dore d'une machinerie fixe à moteur électrique.
Plan de la ligne de l'avant-projet, dressé par Levy-Lambert en 1892. Le tracé est légèrement plus long que ce
qui sera adopté ; on note également la présence d'un second pont peu avant la gare amont.(Coll. Laurent Berne)
Le projet du funiculaire est porté en 1893 par Jean Giraudon, qui formule le 1er octobre 1894 auprès de la commune du Mont-Dore une demande de concession pour la construction et l'exploitation d' « chemin de fer funiculaire d’intérêt local entre Le Mont-Dore et le Salon du Capucin ». Le projet, présenté en séance du Conseil municipal, reçoit un avis favorable des élus le 21 octobre 1894. Après un avis favorable du Conseil général le 23 avril 1895, un traité réglant, avec le cahier des charges, toutes les conditions de la concession est signé entre Léon Chabory, le maire du Mont-Dore, et Jean Giraudon le 21 mai 1895. La concession est finalement actée par une convention le 1er avril 1896 pour une durée de soixante-dix ans, sans subvention ni garantie d’intérêt, avec le versement d'une redevance annuelle fixe. La déclaration d'utilité publique est ensuite prononcée par la loi du 13 avril 1897.
Jean Giraudon (coll. Philippe Planeix).
Une construction franco-suisse
La conception finale du funiculaire est supervisée par l'ingénieur Charles Nithard, établi à Ecully près de Lyon, et la partie électrique de la construction confiée à la société A. Guitton & Cie de Saint-Étienne, licenciée en France des ateliers suisses Maschinenfabrik Oerlikon (MFO), tandis que l’ensemble des poulies de la machinerie est construit par les établissements Fournier et Cornu, de Génelard, en Saône-et-Loire.
L’appareil s’inspire techniquement des trois funiculaires réalisés en 1893 au Stanserhorn (Suisse) par les ateliers Theodor Bell de Kriens (voir le reportage de Kilano18 sur ces appareils).
Il est également fait appel à plusieurs autres intervenants : le câble est réalisé par la tréfilerie de Bourg-en-Bresse ; la courroie principale est fabriquée par les Établissements Foulletier Frères, tanneurs à Saint-Chamond ; enfin, les ateliers helvétiques Bauermeister & Bell sont associés pour la conception générale des deux véhicules et la fourniture de plusieurs pièces comme les contrôleurs.
Différentes plaques d'origine des entreprises qui sont intervenues sur le funiculaire présentes en machinerie.
Les travaux du funiculaire du Capucin sont entamés sur site à compter du mois de mai. Les gares sont d’allure simple et privilégient la fonctionnalité. La pierre d'andésite, plutôt coûteuse est utilisée avec parcimonie, uniquement pour les radiers et la salle des machines. Pour le reste, les corps sont entièrement réalisés en bois.
Les ouvriers posant devant la gare amont. (coll. Philippe Planeix)
Au niveau du lieu-dit la Fontaine-Pétrifiante, l’usine hydroélectrique destinée à alimenter en énergie le funiculaire, est construite en parallèle selon les plans de l’ingénieur Lavezzari. Une conduite forcée de 860 mètres de longueur amène l’eau jusqu’au bâtiment de production, situé 31,5 mètres en contrebas, à mi-chemin entre Le Mont-Dore et La Bourboule.
La prise d'eau à la rencontre entre la Dordogne et le ruisseau de l'Enfer, alimenté par le lac de Guéry. (Coll. Laurent Berne)
Pour l’alimentation du funiculaire, une turbine de 180 ch d'origine Neyret-Brenier est installée et reliée à un alternateur à courant triphasé à fer tournant Oerlikon capable de produire 138 kW à 3600 Volts sous 50 Hz. Le courant est transporté jusqu’au Mont-Dore par les hauteurs du plateau du Rigolet suivant une ligne de 3 400 mètres. Au funiculaire même, un moteur à courant alternatif Oerlikon est installé par Adrien Guitton.
L'usine de production électrique, implantée au bord de la Dordogne, en contrebas de la route de La Bourboule. (Coll. Laurent Berne)
Les travaux du funiculaire s’achèvent fin mai 1898 ; ils auront coûté 346 559 francs de l'époque (soit environ 1,4 million de nos euros actuels). Le premier funiculaire de France à utiliser l’énergie électrique est officiellement inauguré le 20 juin 1898 en présence de M. Aneza, conseiller représentant M. le Préfet, après avoir passé sans encombre, les 8 et 9 juin, les tests de contrôles supervisés par les ingénieurs des Mines et des Ponts et Chaussées, en particulier les essais de freinage des véhicules en roue libre à charge maximale. Il est à noter que la gare amont s'agrandit quelques temps après d'une petite extension sur l'arrière pour l'installation d'un second moteur Oerlikon utilisable en secours du premier.
Revue L’Électricien, 2 juillet 1898, relatant l'inauguration du
funiculaire le 20 juin de la même année. (Coll. Laurent Berne)
Le premier funiculaire électrique de France à son ouverture. (Coll. Laurent Berne)
Le bâtiment amont reçoit rapidement une petite extension sur l'arrière pour l'installation d'un second moteur Oerlikon utilisable en secours. (Coll. Laurent Berne)
Outre une motorisation électrique, le funiculaire adopte infrastructure à voie unique avec évitement Abt. Il emploi également un frein automatique système Bucher et Durrer dont les pinces agissent directement sur les rails et permettent de se passer de la crémaillère centrale généralement installée pour le freinage (nous y reviendrons). Notons que si cette configuration est désormais courante, le funiculaire du Capucin n'est rien d'autre que le premier appareil français à bénéficier d'une ligne monovoie à évitement Abt sans crémaillère.
Configuration monovoie, sans crémaillère. (Coll. Laurent Berne)
L'évitement Abt en milieu de ligne. (Coll. Laurent Berne)
À compter du 27 août 1900, conformément à la convention, la « société anonyme d’électricité du Mont-Dore et du funiculaire du Capucin » est créée par Jean Giraudon pour l'exploitation de l'appareil.
(Coll. Laurent Berne)
La vie du funiculaire du Capucin
La période faste de la Belle Époque
À sa mise en service, le funiculaire du Capucin enregistre jusqu'à 60 000 voyageurs par année d'exploitation, de mai à octobre. Alors que l'air des cimes est vanté par la médecine de l'époque pour sa pureté et ses bienfaits, l'accès facile à un site d'altitude par un moyen de transport mécanique constitue une première régionale appréciée par les curistes et la clientèle chic en séjour au Mont-Dore, qui aiment à emprunter le funiculaire pour se rendre au Salon du Capucin, au grand dam des muletiers, qui conservent cependant, pour un temps encore, la desserte du Puy de Sancy. Une attention toute particulière est même portée à l'égard des voyageurs les plus aisés, qui disposent d'un compartiment 1ère classe fermé.
Ce succès inspire la station thermale voisine de La Bourboule, qui inaugure en 1902 le funiculaire conduisant au plateau de Charlannes, un appareil cependant plus rustique, à contrepoids d'eau et crémaillère de freinage, qui a l'originalité de disposer d'un tracé à deux demi-tronçons avec un palier intermédiaire à mi-chemin, où les deux voitures se rejoignent et repartent en sens inverse (voir le reportage du TPH pulsé de Charlannes).
Ombrelle pour les dames, chapeau pour les messieurs : la clientèle bourgeoise fait les belles heures du funiculaire et les voitures affichent complet. (Coll. Laurent Berne)
Si, une fois l'engouement de la découverte passé, la fréquentation de l'appareil se tasse autour de 45 000 passagers, le funiculaire reste une affaire des plus rentables : en 1910, par exemple, la société enregistre 27 127 francs de recettes tandis que les dépenses d'exploitation s'élèvent à 6 110 francs. La remontée génère également une petite activité économique directement autour de la gare aval : plusieurs échoppes touristiques se montent le long de l'allée qui conduit au départ.
Au pied du funiculaire, un alignement de commerces prend rapidement place. (Coll. Laurent Berne)
Mais l'établissement qui tire le mieux parti du succès du funiculaire est, sans conteste, la petite buvette du Salon du Capucin. Au fil des années, plusieurs corps de bâtiments sont ajoutés à la construction. La buvette devient bientôt un salon de thé, puis une importante brasserie. Sa terrasse en clairière au milieu de la forêt voit passer plusieurs centaines de personnes les jours de grande affluence ! Des terrains y sont également aménagés pour le tennis, le croquet ou le roller, mais également, pour le tir au pigeon.
Le succès du funiculaire est tel que la commune envisage même la création d'un second funiculaire, sur le versant de vallée qui fait face au capucin !
Les curistes viennent nombreux se détendre à la terrasse du Salon du Capucin, aménagée dans une grande clairière. (Coll. Laurent Berne)
Lors de la première guerre mondiale, le funiculaire arrête un temps son exploitation à compter d’août 1914, du fait de la mobilisation des employés au front. Mais, autonome en énergie grâce à son usine de production électrique, il reprend du service dès la saison 1915. L'appareil bénéficie de la venue des militaires gazés qui viennent en convalescence au Mont-Dore, mais les recettes sont tout de même divisées par plus de deux. La fréquentation retrouve cependant un rythme soutenu à l'issue du conflit, même si l'instabilité économique oblige, à partir de 1925, à revoir sensiblement à la hausse les tarifs des tickets.
En 1931, l'exploitant commande à l'architecte Marcel Jarrier, fils de Louis, une rénovation de la gare aval. La structure existante est prolongée sur l'arrière pour accueillir plus confortablement les clients attendant de pouvoir embarquer. Le bardage en bois, rustique et vieillissant, est remplacé par des murs en béton.
En 1931, Marcel Jarrier conduit l'agrandissement de la gare aval qui abandonne son rustique bardage bois au profit du béton. (Coll. Laurent Berne)
La concurrence du téléphérique du Sancy et le développement des sports d'hiver
Mais la fréquentation de l'appareil s'érode. Le funiculaire entre en concurrence avec les excursions en cars organisées par les établissements du centre-ville. Dans un contexte général de crise, l'exploitant cède son activité de production d'énergie à la société d'électricité L’Énergie Industrielle (nationalisée en 1946 avec d'autres sociétés pour former EDF) et devient la Société du Funiculaire du Capucin. Bientôt, l'appareil doit également compter avec les nombreuses autres remontées mécaniques dites de belvédères. Des funiculaires, des chemins de fer à crémaillère et, chose nouvelle, d'audacieux téléphériques se développent un peu partout en montagne. Au Mont-Dore même, l'aviateur Dieudonné Costes commande aux ateliers parisiens Applevage le téléphérique du Sancy (voir le reportage TPH du Sancy n°1). L'appareil, mis en service décembre 1936, offre un accès facile au célèbre Puy de Sancy et constitue, avec sa ligne aérienne suspendue à un unique pylône, une attraction autrement plus impressionnante que la montée en funiculaire. Pour autant, le funiculaire conserve sa clientèle de curistes et de séniors, qui trouvent, au Salon du Capucin, un agréable lieu de détente dans un cadre verdoyant.
En 1936, une autre attraction fait son apparition dans la vallée : le téléphérique du Sancy, qui vient concurrencer le funiculaire. (Coll. Laurent Berne)
L'exploitant du Capucin tente de tirer parti du développement des sports d'hiver impulsé par le téléphérique et les nouveaux remonte-pentes et s'essaye à une ouverture hivernale. La société vise la clientèle non-skieuse, mais également sportive : l'appareil donne en effet accès aux chemins enneigés du plateau, propices à la pratique du ski nordique, ainsi qu'à quelques pistes de descente sommairement aménagées au fil du temps sur les pentes du Capucin.
Rare photo de l'exploitation hivernale du funiculaire. (Coll. Laurent Berne)
Le funiculaire est mentionné aux côtés du téléphérique et des remonte-pentes sur une réclame de 1947. (Coll. Laurent Berne)
On réalise même, au départ du funiculaire, la piste F, également appelée piste du Mamelon Vert, de 500 mètres de longueur, avec un chemin qui rejoint la maison du garde forestier, où une large trouée offre une belle plongée en direction du parc municipal. L'exploitation de l'appareil nécessite cependant des efforts de déneigements importants et la fréquentation reste limitée au regard de celle estivale.
Au final, la seule remontée qui assurera véritablement de façon appuyée la pratique du ski alpin au niveau du Capucin reste le téléski débrayable des Pradets, dont la construction en 1955 s'accompagnera d'importants travaux de déboisement pour la réalisation de la piste qui le jouxte.
Bien que courtes, les pistes du Capucin permettent de skier en profitant d'un beau panorama sur la ville. (Coll. Laurent Berne)
L'hiver, c'est désormais tout un réseau de pistes et de remontées mécaniques qui sont au service de la pratique du ski alpin en pleine
expansion. Le funiculaire tente de tirer parti de cet afflux de clientèle nouvelle et quelques pistes sont sommairement aménagées
au niveau du Capucin, mais les skieurs leur préfèrent les champs de neige du Sancy, desservis depuis 1936 par un emblématique
téléphérique qui concurrence également le funiculaire à la saison estivale. (Coll. Laurent Berne)
Le funiculaire sauvé par la commune
L'après Seconde Guerre mondiale voit le déclin des stations thermales et le Mont-Dore oriente désormais son développement touristique en direction des activités hivernales. Le funiculaire, initialement pensé pour le tourisme estival, n'assure plus l'équilibre financier de la société d'exploitation qui se voit contrainte de cesser son activité en 1950. Heureusement, l'appareil, bien pensé, bien construit et d'une audacieuse modernité lors sa mise en service, ne nécessite pas de gros travaux de maintenance pour fonctionner (outre le changement du câble tous les 15 ans). Aussi, au regard de son intérêt touristique, la commune du Mont-Dore choisit d'en assumer les charges et d'en reprendre l'exploitation le 10 août 1950. À La Bourboule, le funiculaire de Charlannes, nettement plus archaïque (bien que plus récent de 4 ans), n'aura pas cette chance et fermera définitivement ses portes en 1956.
Sous l'égide de la commune du Mont-Dore, les voitures du Capucin reçoivent une nouvelle livrée inspirée des couleurs dominantes du blason de la ville : jaune sur les faces latérales (comme sur le téléphérique du Sancy), rouge et blanc Carrare sur les faces avant et arrière. La commune optimise les coûts de fonctionnement en ne reconduisant pas le poste à temps plein de chef de gare, au départ à la retraite de Pierre Vigier, et en abandonnant définitivement l'ouverture hivernale. Le funiculaire est ponctuellement utilisé en nocturne dans les années 1960 et 1970, à l'occasion de grands bals municipaux donnés au Salon du Capucin. L'appareil poursuit son service avec une fréquentation honorable qui atteint 50 000 à 55 000 voyageurs par an.
Les voitures abandonnent leur livrée initiale pour un rouge et un jaune qui évoquent les couleurs du blason de la ville du Mont-Dore.
Le jaune, qui se retrouve également sur les cabines du téléphérique du Sancy, donne aux remontées du Mont-Dore une certaine unicité. (Coll. Laurent Berne)
Un entretien respectueux du patrimoine
Après 77 ans d'exploitation, le funiculaire s'offre une petite cure de jeunesse à la fin de la saison 1975. Cette étape marque le début d'une longue collaboration entre la commune et le cabinet ERIC, qui va conduire, avec le souci du respect de ce patrimoine, toutes les opérations de rénovation et de mises aux normes du funiculaire jusqu'à nos jours. Les boiseries des véhicules sont restaurées et la caisse rigidifiée ; la voie est révisée avec reprise de l'alignement ; la machinerie bénéficie de nouvelles sécurités et un nouveau poste de commande avec console électronique est aménagé dans un local en surplomb de la voie - l'ancien poste, situé à proximité de la poulie motrice, est cependant conservé pour sa valeur patrimoniale.
À la fin de la saison 1980, c'est au tour du châssis des véhicules d'être révisés. À cette occasion, on met fin au confinement des anciens compartiments première classe par le percement de quatre ouvertures vitrées sur chacune des parois de cloisonnement.
Voiture du funiculaire en 1981, après révision du châssis et percement d'ouverture sur les cloisons du compartiment fermé. (Coll. Laurent Berne)
Après 86 ans d’existence, le funiculaire du Capucin, plus vieux transport de voyageurs par câble de France en service, obtient en décembre 1984 son inscription au titre des Monuments Historiques. Deux ans plus tard, les deux voitures construites en 1897 sont classées au titre objet.
La commune conduit entre 1991 et 1993 une grande rénovation du funiculaire. Les cabines sont restaurées, avec la reconstitution à l'identique de toute la boiserie par la menuiserie Espinasse, une entreprise locale, qui, pour s'aider dans sa tâche, a du installer dans son atelier un plan incliné ! Les véhicules abandonnent pour l'occasion leur livrée jaune et rouge au profit d'une élégante finition vert bouteille, plus évocatrice de l'esprit Belle Époque qui a vu naître le funiculaire. La géométrie de la voie est également corrigée, en particulier au niveau de l'évitement, et les parties affaissées de la plateforme des rails sont reprises.
Plusieurs opérations de travaux sont encore régulièrement réalisées sur l'appareil, mais elles ne concernent que de la mise aux normes ou du remplacement de pièces arrivées en fin de vie (la remise à neuf du frein d'urgence et le remplacement des dents en bois des poulies en 1995, la réfection des freins de voie des cabines en 2009 et 2010). Au final, le funiculaire, qui a fêté ses 110 ans en 2008, conserve intrinsèquement son aspect et sa configuration d'origine, parfaitement entretenu par une municipalité bienveillante.
Au milieu des arbres centenaires, le funiculaire du Capucin conduit, sans défaillir depuis 1898, les touristes au sommet de la colline.
La gare aval : Le Mont-Dore
Situation et extérieurs
Du cœur touristique du Mont-Dore (thermes, casino, place du Panthéon), on gagne le départ du funiculaire par le parc municipal qui longe le cours de la Dordogne. La gare de la remontée est située à 140 mètres du jardin public, après le pont Menaydier, au bout de la rue du Docteur-Rémy-Moncorget. Le bâtiment est implanté en lisière de forêt, à 1 070 mètres d’altitude.
La gare de départ du funiculaire est située en lisière de la forêt, au bout de la rue du Docteur-Rémy-Moncorget.
L'édifice, de largeur modeste, est constitué de deux long murs gouttereaux parallèles en béton enduit qui reposent sur un radier en parement de pierres d'andésite. La construction se démarque par sa toiture du quai, dont le faîtage reprend la pente naturelle du terrain et invite à porter le regard en direction de la ligne du funiculaire. Les deux corps de toiture sont réalisés en charpente en bois et recouverts d'ardoise locale. Aux extrémités, les fermes en pignon sont habillées d'un bardage vertical en bois laqué vert-de-gris.
La gare de départ, tout en longueur, se démarque par sa toiture du quai, dont le faîtage reprend la pente naturelle du terrain.
La gare et, en second plan, ce qui était initialement une maison propriété de Jean Giraudon.
L'ouverture du quai sur la ligne, vue depuis la rue du Docteur-Rémy-Moncorget.
Les fermes en pignon sont habillées d'un bardage vertical en bois laqué vert-de-gris.
La pimpante petite gare a été réhabilitée avec goût sous la conduite de Paul Carves (Architecte et Urbaniste en Chef de l'État, Architecte des Bâtiments de France) pour le centenaire du funiculaire, en conservant la structure issue de la reconstruction conduite en 1931 par Marcel Jarrier. Le mur gouttereau en béton du quai, côté rue, jadis aveugle, s'ouvre désormais sur l'extérieur grâce à l'emploi de grandes baies vitrées. Une modification récente, mais qui, de par l'agencement des multiples panneaux entre meneaux et linteaux, confère au bâtiment un style délicieusement rétro et permet au promeneur de voir la voiture depuis l'extérieur. La rénovation communale a également vue la restructuration du perron avec le repositionnement de l'escalier en pierre d'andésite sur l'avant de gare, qui forme un ensemble symétrique accueillant, invitant le visiteur à pénétrer à l'intérieur.
La gare avant la rénovation du centenaire. (Philippe Planeix)
La gare après la rénovation est désormais un édifice coquet, évocateur de la Belle Époque.
Le bâtiment s'ouvre désormais sur l'extérieur grâce à l'emploi de grandes baies vitrées.
L'accueillant perron d'entrée.
Intérieur
Le hall d'accueil, sobre et lumineux, joue avec les volumes, les couleurs et la matière. Il mélange habilement des éléments modernes tels les éclairages encastrés ou la retombée circulaire traitée en blanc, avec des détails Belle Époque comme le carrelage en mosaïque, la menuiserie vernie travaillée marquant la séparation avec la halle des quais, les colonnettes au pied desquelles des banquettes permettent de s’asseoir en attendant le prochain départ. Sur les murs plusieurs affiches retracent des moments de la vie du funiculaire.
Le traitement architectural mélange habilement éléments modernes (spots, plafond) et anciens (mosaïque, colonnettes).
Une belle menuiserie travaillée sépare le hall d'entrée des quais.
La caisse.
Le personnel invite ensuite le voyageur à gagner le quai de départ. Ce dernier se présente en rampe épousant le profil de la ligne, avec deux volées d'escalier en pierres d'andésite et béton de part et d'autre des rails. Une élégante balustre en bois verni vient marquer la fin de la voie. La halle reste lumineuse du fait des grandes baies vitrées du mur gouttereau nord.
La halle des quais, avec ses deux volées d'escaliers suivant le profil de la ligne.
Vue sur la halle des quais depuis le haut.
Une voiture à quai attend ses passagers.
Embarquement à bord du funiculaire du Capucin.
La ligne
Caractéristiques générales
Le tracé rectiligne du funiculaire se développe sur une longueur suivant la pente de 488,50 mètres et assume une dénivelée de 174 mètres 85. L'infrastructure est à voie unique, sans crémaillère centrale du fait du frein de voie Bucher et Durrer agissant directement sur le rail. La ligne se dédouble à mi-parcours, sur 38 mètres, au niveau de l'évitement Abt, qui permet le croisement des voitures sans lame d'aiguille mobile.
La ligne du funiculaire sur une vue 3D Google Earth.
La ligne du funiculaire sur une vue à plat Google Earth.
La voie, à écartement métrique, est équipée de rails Vignole avec un champignon à profil trapézoïdale renversé adapté aux freins de secours des voitures. Les rails sont boulonnés, à intervalle de 90 cm, sur des traverses métalliques qui prennent place sur une plateforme maçonnée. Le câble, d'un diamètre de 33 mm, est supporté par des galets en fonte. Comme beaucoup d'éléments du funiculaire, les rails sont encore ceux d'origine ; ils datent de 1896 et proviennent de la fonderie de Bessèges (Gard).
Gros plan sur la voie et les galets de soutien du câble.
Les rails Vignole ont un champignon à profil trapézoïdale renversé adapté aux freins de secours des voitures.
Parcours
La montée se fait à la paisible vitesse de 1 mètre par seconde. Durant les 8 minutes 45 qu'il faut pour rejoindre la station opposée, le voyageur à tout loisir d'observer l'environnement, bercé par le craquement de la vieille voiture en bois et les bruits de frottements métalliques. Après un bref passage surélevé sur un ouvrage en pierre situé au sortir de la gare, la ligne, à profil convexe, attaque directement, sur 210 mètres, sa pente maximale de 54,50 %.
La ligne au sortir de la gare.
La voie est d'abord surélevée sur un ouvrage en pierres maçonnées.
La ligne dans sa pente maximale de 54,50 %.
L'ascension se poursuit à la paisible vitesse de 1 mètre par seconde.
145 mètres après le départ, la ligne passe sous le pont du Chemin des Artistes, une des promenade réputée du Capucin. Notons qu'à l'origine, un second pont avait été prévu par Levy-Lambert peu avant la gare amont, mais que, suite à l'adoption d'un tracé définitif moins long et un réaménagement des chemins alentours, celui-ci ne sera pas construit.
Le pont du Chemin des Artistes, un ouvrage réalisé en pierres d'andésite.
Vue opposée sur le pont.
À l'ascension du Mamelon Vert, la voie évolue sur un déblai dont le creusement tend à s'accentuer au fur et à mesure que la voiture avance. Au niveau de l'évitement, la pente s'adoucit une première fois à 39,40 % sur 20 mètres. Comme habituellement sur les funiculaires, les voitures s'y croisent toujours du même côté grâce à leurs essieux asymétriques avec une roue guide à deux boudins qui suit le rail extérieur de l'évitement et une roue plate, sans boudin, apte à franchir le cœur de l'aiguillage.
Toujours dans une pente de 54,50 % la voie évolue sur un déblai dont le creusement tend à s'accentuer.
Arrivée au niveau de l'évitement Abt.
L'évitement et la voiture descendante.
La voiture 2 s'engage à droite.
Croisement des voitures.
Cœur de l'aiguillage sans aiguille mobile amont de l'évitement.
L'inclinaison des poulies permet au câble de suivre la déviation de la voie.
Coup d’œil vers l'aval avec la vue en enfilade sur le Mont-Dore. (CC by-sa-nc the-tml)
Sur les 215 mètres de ligne restant à parcourir, la pente s'adoucit à 24,40 %. La plateforme de la voie évolue d'abord sur un remblai, avec, sur 10 mètres, la présence d'un mur de soutènement de 6 mètres de haut, pour finir en léger déblai avant de retrouver le niveau du sol fini juste avant l'entrée en gare amont.
La pente s'adoucit à 24,40 % et la gare amont se laisse désormais apercevoir.
Arrivée sur la gare amont.
La cabine rentre en gare amont.
La gare amont : Le Salon du Capucin
Situation et extérieurs
Implantée à 1 245 mètres d'altitude en léger contrebas du plateau, la gare amont est demeurée quasiment inchangée depuis l'ouverture du funiculaire. Comme en gare aval, le bâtiment se structure en deux volumes : sur l'avant, la halle des quais, avec une toiture dont le faîtage reprend la pente de la ligne, et en retrait, un bâtiment fermé qui abrite la salle d'attente, le guichet, la salle des machines et le poste de conduite. Autres points communs avec la gare aval : la charpente en bois, avec sa couverture en ardoise locale, et la ferme en pignon du quai habillée d'un bardage vertical en bois laqué vert-de-gris.
La halle des quais dispose d'une ferme en pignon habillée d'un bardage vertical en bois laqué vert-de-gris.
Avec ses murs en moellons de basalte, la construction se démarque cependant de la station de départ par son architecture traditionnelle de montagne auvergnate à l'aspect plus simple mais surtout, plus massif.
Le volume arrière et ses murs en moellons de basalte.
Mur en basalte et couverture en ardoise : une architecture traditionnelle de montagne auvergnate.
Aux abords de la gare la commune a aménagé des bancs et des tables de pique-nique.
La halle des quais, initialement en structure bois ajourée, a été reconstruite en 1931 lors de la rénovation de la gare aval conduite par Marcel Jarrier. Les murs gouttereaux sont depuis cette date en béton crépi. Contrairement à la gare aval, les ouvertures sont ici de taille restreinte suggérant, toutes proportions gardées, un climat de montagne plus hostile.
Le faîtage de la toiture de la halle des quais suit la pente de la ligne.
La halle des quais reçoit des ouvertures de taille plus restreinte qu'en gare aval.
Intérieur
Les quais épousent le profil de la ligne ; deux volées d'escalier en pierres d'andésite et béton sont situées de part et d'autre de la voie. En hauteur, dans le prolongement de la voie, se trouve la baie vitrée du poste de conduite.
La halle des quais.
Patrick Delcaire, à son poste de conduite. Le local a été aménagé en 1975.
Derrière la baie vitrée, le conducteur a une vue parfaite sur le quai et la voiture rentrant en gare.
Le pupitre dispose de divers relais et indicateurs de position, de vitesse (etc) et est équipé d'une manette homme-mort.
La fin de voie, et, sur le côté le rail jaune permettant le rechargement des batteries des voitures.
Cabine arrivée au terme de son trajet.
La cabine rentrée à quai.
La machinerie historique
C'est toujours la machinerie d'origine avec ses poulies réalisées et montées par la société Fournier et Cornu avec ses deux moteurs Oerlikon fournis par A. Guitton & Cie qui entraîne vaillamment les véhicules du funiculaire. Au sortir du quai, les clients curieux se posent un instant au niveau de la fenêtre qui donne sur la salle des machines pour observer la cinématique de cet agencement de poulies et d'engrenages plus que centenaire. Le personnel, passionné, se prête même volontiers à une visite de cette machinerie de 1898 inscrite au titre des Monuments Historiques pour le plus grand plaisir des ferroviphiles et des câblophiles, ou tout simplement des amateurs d'histoire.
Treuil - poulies
Le renvoi et la mise en mouvement du câble reposent sur une configuration à poulie motrice double-gorge, associant une poulie de guidage et une contre-poulie. Le câble pénètre dans la machinerie au travers d'une ouverture et est dévié vers le bas par la poulie de guidage. Il s'enroule ensuite par le bas autour de l'imposante poulie motrice de 4 mètres de diamètre. Il repart en direction de la contre-poulie, légèrement inclinée, pour être à nouveau renvoyé sur la poulie motrice, au niveau de la deuxième gorge, puis repart ensuite en direction de la voie. Ce principe de double-renvoi permet de garantir l’adhérence du câble sur la poulie motrice.
Cinématique de l'enroulement et du renvoi du câble dans la machinerie - de 1 à 8. (Coll. Laurent Berne)
La voie vue depuis l'ouverture du passage du câble dans la salle des machines.
La pénétration du câble dans la salle des machines.
Un brin file en direction de la poulie motrice, tandis que l'autre est dévié vers le bas par une poulie de guidage.
Un brin arrive au niveau de la poulie motrice par le haut, le second arrive par le bas, sur l'autre gorge.
Entre la poulie de guidage et la poulie motrice, une contre-poulie légèrement inclinée assure un double-renvoi.
La contre-poulie permet au câble d'être renvoyé une seconde fois au niveau de la poulie motrice.
La contre-poulie et la poulie motrice à double gorge.
Entraînement
Le treuil est animé par un moteur électrique à courant alternatif Oerlikon développant 66 kW à 490 tours/minute, alimenté via le réseau (initialement via l'usine hydroélectrique). En cas de panne sur ce moteur, un second, de caractéristique identique, est à même de prendre le relais. Le moteur est accouplé, via une large courroie plate finition cuir, à un tambour sur l'axe duquel est monté le volant du frein électrique de service.
Le tambour anime un premier étage de réduction à engrenage à denture droite qui, lui même, entraîne un second étage. Il s'agit d'un pignon à dentures à chevrons qui met directement en mouvement la poulie motrice. Celle-ci est, en outre, équipée d'un frein d'urgence fonctionnant avec une bande Ferodo qui vient, sous l'action d'un contrepoids, serrer la poulie entre les deux gorges de passage du câble.
Vue large sur la salle des machines.
Au premier plan, le moteur électrique entraîne un tambour via une large courroie plate.
Gros plan sur le moteur électrique à courant alternatif Oerlikon de 66 kW à 490 tours/minute.
Deux tiges filetées permettent de régler la position du moteur pour assurer la tension optimale de la courroie.
Un second moteur peut être mis en service en cas de défaillance du premier.
Suite de la cinématique avec une vue large sur le tambour et les deux étages de réduction et la poulie motrice.
Le frein de service électrique dont le volant est monté sur l'axe du tambour. Ce freinage a été installé en 1995 en remplacement de celui d'origine (voir plus bas).
Derrière le tambour, se trouve le premier étage de réduction à engrenage. Les dentures droites de la poulie sont en bois et sont changées chaque année
par le personnel. Le recours aux dents en bois, aisées à remplacer, permet de limiter l'usure due au contact fer-fer et ainsi garantit la longévité.
Gros plan sur le pignon du premier étage de réduction. On remarque le volant qui le jouxte. Il s'agit du tambour
de l'ancien freinage de service à mâchoire, démonté en 1995 au profit de l'actuel.
Dans le prolongement de l'axe de la poulie dentée, le dernier étage de réduction est constitué d'un pignon agissant directement sur la poulie motrice.
Toujours dans un souci de longévité, la denture est ici à chevrons de manière à diminuer l’effort axial sur l'engrenage.
Le pignon à chevrons est équipé d'un compteur de vitesse.
Un tachymètre est également situé sur la bande périphériquee de la poulie motrice.
Ressort de rappel du frein-mâchoire de sécurité agissant sur la couronne de la poulie motrice.
Ancien poste de conduite
Avant la création du poste de conduite actuel en 1975, le conducteur prenait place au centre de la machinerie ! Dans le brouhaha incessant des bruits mécaniques et du ronflement de moteur, au milieu des poulies et des engrenages, sans aucune visibilité sur la voie, il devait conduire le funiculaire avec son rhéostat de démarrage et de ralentissement, et son volant de frein, avec pour seul repère le grand indicateur de position qui trône au centre de la salle. Ce dernier fonctionne via une vis sans fin, entraînée par l'arbre de la poulie motrice, qui déplace une flèche indiquant la position de la voiture n°1 sur la ligne. Cette pièce, fournie par Bauermeister & Bell, est toujours parfaitement fonctionnelle. D'ailleurs, ce sont ses contacteurs, qui, au passage de la flèche, fournissent l'information de position au pupitre du poste de conduite contemporain.
Au centre de la machinerie, l'ancien poste de conduite du funiculaire, qui a servi jusqu'en 1975.
Le rhéostat de démarrage et de ralentissement, et le volant de frein ont été conservés pour mémoire.
Les trois appareils de mesure qui étaient à disposition du conducteur.
L'indicateur de position fonctionne via une vis sans fin entraînée par l'arbre de la poulie motrice. Durant la marche, la flèche rouge circule,
guidée par la vis, et indique la position de la voiture n°1 sur la ligne. Sur son parcours, la flèche rencontre des contacteurs qui, désormais,
renvoient l'information de position sur le pupitre dans le poste de conduite contemporain.
Les véhicules
Extérieur
Le matériel roulant du funiculaire du Capucin demeure visuellement inchangé depuis 1898 grâce à un excellent suivi et aux restaurations successives effectuées dans le respect de son classement au titre des Monuments Historiques. Selon la description de l'acte de concession, les deux voitures devaient "être faites d'après les meilleurs modèles et satisfaire à toutes les conditions réglées ou à régler pour les voilures servant au transport des voyageurs sur les chemins de fer". Les concepteurs de l'époque se sont donc tournés vers les ateliers suisses Bell, qui venaient de réaliser les funiculaires du Stanserhorn. Électriques et sans crémaillère centrale grâce à des véhicules au châssis intégrant le freinage de voie Bucher et Durrer, ces appareils s'affirmaient comme des modèles de modernité ! Les voitures du funiculaire du Capucin sont donc une copie de celles du Stanserhorn : elles disposent d'un châssis identique et d'une caisse en bois en gradin similaire à quatre compartiments centraux et deux plateformes ouvertes aux extrémités. Celles du Capucin se démarquent simplement par la présence d'un compartiment cloisonné, initialement dédié à la première classe, et par un gabarit plus généreux de 2,4 mètres de large par 9 de long. Chaque voiture pèse 5035 kg à vide.
La commune a pris l'entière conscience de l'atout que représentait ces vieilles voitures pour l’attrait du funiculaire et tous les détails sont pensés pour que le charme Belle Époque opère : l'élégante livrée vert bouteille est discrètement rehaussée de liserés blancs mettant en évidence les chanfreins de la caisse en bois, l'intérieur blanc crème fait ressortir les équerres en ferronnerie foncées tandis que des rideaux blancs habillent les montants verticaux marquant la séparation des compartiments. Même le récent boitier de commandes à une allure de coffret rétro.
Caisse en bois chanfreinée, livrée élégante, ferronneries, rideaux blancs : les voitures incarnent tout le charme de la Belle Époque.
La voiture n°1 à quai en gare amont.
Vue de face sur la voiture n°1, à quai en gare aval.
Compartiments
Dans chaque compartiment ouvert, deux bancs en lattes de bois rouge Carmin installés en face à face permettent à dix passagers de voyager assis. Dans le compartiment fermé, anciennement dédié aux premières classes, huit personnes peuvent prendre place sur deux confortables banquettes rembourrées. Initialement, chaque plateforme terminale accueillait également six personnes debout, mais pour des raisons de sécurité, seul le cabinier est désormais autorisé à y prendre place. À raison d'un départ toutes les 20 minutes, les voitures peuvent, au total, transporter 114 passagers par heure et par sens.
Vue sur les trois compartiments ouverts en gradins.
Les compartiments disposent de deux bancs en lattes de bois rouge Carmin installés en face à face permettant dix passagers.
Le compartiment fermé.
À l'intérieur du compartiment fermé, deux banquettes rembourrées permettent d'accueillir 8 personnes.
Les portes des compartiments sont verrouillées par des taquets, via une coulisse commandée par un levier.
La voiture n°1 et la plateforme amont.
Gros plan sur la plateforme amont du cabinier.
Commandes
Depuis la plateforme, le cabinier peut commander les freins de voie à l'aide d'un levier, ou par appui sur le bouton d'arrêt d'urgence qui est venu remplacer en 2010 le système mécanique de pédale originel. Le boitier de commandes, récemment installé par Seirel, permet également d'actionner le freinage de service situé en gare amont et de prendre connaissance de l'état de divers fonctions via une série de huit témoins à diodes électroluminescentes. Il dispose enfin d'un bouton "Prêt" sur lequel chaque conducteur doit appuyer pour valider le départ.
La plateforme aval du cabinier. On note la présente du levier de commande des freins sur la gauche.
Le poste de commande du cabinier.
Gros plan sur le boitier Seirel.
La communication téléphonique se fait par transmission radio tandis que la transmission des données est réalisée par induction grâce à un câble qui court le long de la voie. L'équipement électronique est alimenté en électricité par une batterie installée sous une banquette du compartiment fermé, rechargée en gare via des contacteurs disposés sous la caisse, qui viennent frotter contre 3 rails électrifiés implantés au niveau de la voie.
Antenne pour la communication téléphonique.
L'inducteur et le câble le long de la voie servent à la transmission des données voitures - gares par induction électromagnétique.
Les batteries et la logique des cabines sont dissimulées sous une banquette du compartiment fermé.
Les patins de prise de courant électrique.
En gare, les patins viennent frotter contre un rail électrique pour recharger des batteries.
Châssis
Le châssis type Bell - Bucher-Durrer dispose de deux essieux qui reprennent le schéma de roulement classique d'un funiculaire à évitement Abt, à savoir une roue à double-boudin, qui guide la voiture sur le rail continu situé du côté extérieur de l'évitement, et une roue tambour (sans boudin) permettant de franchir les cœurs des aiguillages de l'évitement sur le rail situé côté intérieur de la partie en double voie.
Vue d'ensemble du châssis type Bell - Bucher-Durrer de la voiture n°1.
Plan et élévation du châssis. (coll. Laurent Berne)
Vue sur un des deux essieux du châssis.
Au premier plan, la roue tambour (sans boudin) permet de franchir les cœurs des aiguillages de l'évitement.
À droite, la roue à double-boudin guide la voiture sur le rail continu situé du côté extérieur de l'évitement.
Tachymètre sur la roue tambour.
La roue tambour et le patin de la prise de courant électrique.
Freins de voie
Les freins de voie système Bucher et Durrer sont à friction et agissent directement sur le rail. Notons que le système de freinage sur rail n'est pas une nouveauté, puisque dès 1860, les ingénieurs français Léon Molinos et Charles Pronnier mettaient en place un tel système de frein sur le funiculaire lyonnais reliant la rue Terme à la Croix-Rousse. Mais Franz-Josheph Bucher et Joseph Durrer sauront populariser la technique en la rendant compatible avec la configuration monovoie à évitement Abt grâce à la forme de coin donnée au rail, forme permettant d'obtenir un degré de sécurité complet, tout en n'agissant que sur un seul rail.
Les mâchoires des freins enchâssent le profil tronconique du champignon du rail-guide et agissent donc directement sur ce dernier. Comme vu plus haut, ce système peut être commandé manuellement depuis les plateformes par le conducteur, mais il se déclenche aussi automatiquement en cas de rupture ou de détente du câble.
Élévation des freins de voie Bucher et Durrer. (coll. Laurent Berne)
Les freins de voie enchâssent le rail-guide et agissent sur le profil tronconique du champignon.
Gros plan sur un frein de voie.
Un des trois freins de voie est commandé mécaniquement par le levier situé sur chaque plateforme terminale via un renvoi à engrenage conique Elpex.
Initialement, et jusqu'en 2010, la barre de traction, désolidarisée du câble, libérait un contrepoids qui, via un embrayage à friction, solidarisait le système d'engrenage des freins sur l'essieu. Celui-ci, par son mouvement, entraînait, via une vis sans fin, le serrage des mâchoires et l'arrêt presque immédiat de la voiture.
En situation normale, le câble exerce une force de traction sur la pièce A qui permet, par appui sur la tige B, de maintenir le bras du contrepoids C
relevé. En cas de rupture de câble, l'absence de force de traction sur la pièce A fait que la force d'appui sur la tige B n'existe plus. Le contrepoids C
chute et entraîne un mouvement de rotation de l'axe E qui (via le guide e) fait appuyer le bras F sur l'embrayage G. Ce dernier asservit la pièce
dentée à l'axe de l'essieu. C'est le mouvement de ce dernier qui, par un jeu d'engrenage J, vient animer l'axe K qui entraîne, via un système de vis sans
fin, la fermeture des freins L sur le rail guide, et provoque l'arrêt de la voiture. Lors de sa chute, le contrepoids C fait pivoter la béquille M, ce qui
provoque la chute du contrepoids N qui entraîne la fermeture des freins situés au niveau de l'essieu aval selon un mécanisme analogue.
L'embrayage mécanique d'origine a été remplacé en 2010 par un embrayage électromagnétique. Commandé par la logique du funiculaire, il permet de se passer des contrepoids et offre l'avantage d'être beaucoup plus réactif, assurant ainsi un temps de freinage raccourci. Pour le reste, la cinématique demeure inchangée et fait toujours appel au système d'engrenage des freins sur l'essieu et de vis sans fin entraînant le serrage des mâchoires.
L'embrayage électromagnétique installé en 2010 (carter noir) et le mécanisme d'engrenage des freins sur l'essieu.
L'embrayage électromagnétique et l'engrenage en vue rapprochée.
Sur les traces des curistes de la Belle Époque
Aux alentours de la gare amont
Noyée dans la végétation, la gare amont n'offre qu'une petite échappée en direction du Mont-Dore. Se pose d'ailleurs la question d'aménager une tour de garde qui permettrait d'offrir aux promeneurs un beau panorama sur la vallée et le Sancy. Pour profiter d'une belle vue, il faut ne faut pas hésiter à marcher et à rejoindre le sommet du pic du Capucin qui offre un panorama original sur le Mont-Dore et le Sancy. On peut d'ailleurs rejoindre le sommet star de la vallée par le sentier des Crêtes. Un billet combiné permettant une montée en funiculaire et une descente en téléphérique (ou inversement) est à cet effet proposé à la vente.
Les familles peuvent regagner le Mont-Dore par une descente facile à l'ombre des essences de sapin, d'hêtre et d'épicéa par le chemin des Mille Gouttes ou des Artistes, avec son pont de pierre croisant la voie du funiculaire. Depuis la gare amont, cinq itinéraires de descente réservés à la pratique du VTT sont également proposés (il existe d'ailleurs des forfaits VTT).
L'arrivée du funiculaire est le point de départ de sentiers aménagés et fléchés.
Vue sur le Mont-Dore à proximité de l'arrivée du funiculaire. (CC by-sa JPM42)
Vue sur le Sancy et le sentier des crêtes depuis le Capucin. (CC by-sa-nc dremmwell)
Le funiculaire dessert également le parc Mont-Dore Aventure qui propose plusieurs parcours de type accrobranche dans les arbres de la forêt du Capucin avec échelles de corde, ponts de singe, cordes de Tarzan, filets, passerelles et plusieurs tyroliennes dont une grande de 150 mètres de longueur.
Le parcours accrobranche Mont-Dore Aventure est situé à l'arrivé du funiculaire. (Mont-Dore Aventure / L. Berne)
Bien entendu, comme à la Belle Époque, le funiculaire donne toujours accès au restaurant du Salon du Capucin, qui a depuis été entièrement reconstruit. Dans la belle salle au style montagnard ou sur la terrasse plein sud, l'on peut s'arrêter le temps d'un verre ou d'un repas auvergnat pour profiter du cadre bucolique de cette clairière, avec la vue sur le pic du Capucin tout proche, émergeant des grands arbres centenaires.
Le nouveau restaurant du Salon du Capucin.
Le restaurant et le sommet du Capucin.
Un double témoin historique
Avec ses élégantes voitures d’antan et sa machinerie historique, le funiculaire du Capucin monte vaillamment, depuis 1898, les touristes, promeneurs et curistes sur les contreforts de cet ancien dôme volcanique qui domine le Mont-Dore. Cet appareil constitue, de fait, un double témoin historique. Un témoin de l’histoire sociale tout d’abord, puisqu’il est un des rares patrimoines techniques intactes de cette période de la Belle Époque, marquée par les progrès, la croissance, l'optimisme et l'émergence d'un certain tourisme bourgeois ; mais également, un témoin de l’histoire ferroviaire et du transport par câble, précurseur français des remontées mécaniques de montagne à vocation touristique, premier funiculaire à traction électrique de France et premier funiculaire français à bénéficier d'une ligne monovoie à évitement Abt sans crémaillère.
Le funiculaire du Capucin est tout simplement le plus vieil appareil à câble français encore dans sa configuration d'origine. Grâce à la volonté de la Commune et à la bienveillance de son personnel qui fait vivre et entretien avec conscience et passion cet appareil historique, la remontée a su s'adapter aux normes actuelles sans dénaturation grâce à des travaux d'entretien toujours réalisés dans le souci du respect de ce patrimoine.
Même si, faute de vue dégagée, l'arrivée n'offre pas de vue panoramique, il ne faut pas hésiter, lors d'un passage au Mont-Dore, à emprunter ce sympathique funiculaire propice à la balade, qui vous fera remonter la pente et le temps, sur les traces des artistes venus prendre les eaux à la Belle Époque.
Laurent Berne
Willy Girard, cabinier, et Patrick Delcaire, conducteur, deux membres de l'équipe qui gère au quotidien le funiculaire.
Informations pratiques :
-Ouverture du funiculaire en 2013 : de mai à octobre
-Accès : du centre-ville du Mont-Dore (thermes, casino, place du Panthéon), remonter l'avenue Menayder ou le parc municipal jusqu'à la rue René-Cassin. Gare de départ située à droite, au bout de la rue du Docteur-Rémy-Moncorget.
-Tarif en 2013 : aller simple adulte : 4,10 € / aller-retour adulte : 5,40 € / tarifs spéciaux enfants, groupes, journée VTT et duo avec téléphérique.
À voir, à lire :
- Les trains du Mont-Dore, Yves Allain, Philippe Planeix, Les éditions du Cabri
- Le Mont-Dore - Funiculaire du Capucin, Partie 1, Partie 2, Partie 3 Michel Azéma, YouTube
Remerciements :
Nous remercions vivement toute l'équipe du funiculaire du Capucin pour son accueil chaleureux et sa gentillesse. Un remerciement tout particulier à Patrick Delcaire, conducteur, et Willy Girard, cabinier, pour leurs explications détaillées. Enfin, je ne saurais terminer sans exprimer toute ma gratitude à ma fidèle relectrice, Anne Laborie.
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