L'incident a-t-il eu lieu avec le palonnier circulant en montée ou en descente?
Sait-on si une activation de frein de chariot a eu lieu (sous-entendu autrement qu'avec le TPH déjà immobilisé)?
Relativement aux infos postées dans le message plus haut, techniquement parlant, on peut relever notamment la spécificité suivante:
Citation
Les deux freins sont modulés
Cela signifie que le frein de service (BB, Betriebsbremse)
et le frein de sécurité (SB, Sicherheitsbremse) sont
tous deux régulés.
La régulation du frein de sécurité (SB) n'est pas très courante mais est en soi une excellente idée pour autant qu'elle soit réalisée correctement (même si pas révolutionnaires, des philosophies de freinage adaptatives plus évoluées seraient parfaitement réalisables avec ls commandes sécurité [niveau SIL 3 ou PL e] modernes). En cas de frein de sécurité régulé il importe de vérifier en détail le niveau de sécurité des vannes rapides car la fonction de modulation de pression hydraulique d'ouverture d'un frein ne peut constituer une fonction de sécurité au sens technique (quantification selon les SIL "process" ou AK selon CEN d'après les EN spécifiques aux RM), raison pour laquelle en cas de défaillance de régulation une ou plusieurs électrovannes dites vannes rapides permettent de décharger la pression du circuit hydraulique d'ouverture (=desserrage) de frein vers le réservoir hydraulique.
Il serait intéressant de voir si le frein de sécurité SB régulé a une commande hydraulique similaire à celle d'un frein de service BB régulé classique (ce qui serait à mon avis un défaut de conception pour des raisons liées aux analyses de risque).
En raison de la contre-pression résiduelle requise pour la régulation (modulation de la pression hydraulique d'ouverture d'un frein régulé), un freinage par vanne rapide entraîne une décélération un peu plus élevée que celle atteignable en freinage maximal lorsque la régulation est opérationnelle.
En général, la régulation de freinage d'une RM est simplement paramétrisée pour une décélération constante du câble tracteur en station motrice (et donc notamment indépendante des conditions de charge, température, tensions des câbles,...). La gestion de la régulation est assurée soit par un (ou plusieurs) sous-système de commande électronique dédié, soit par un (ou plusieurs) automate programmable (dédié ou non). Les normes imposent certaines indépendances pour éviter les défauts de cause commune pouvant notamment entraîner un surfreinage dangereux.
Citation
le chevauchement des câbles est surveillé par le système SISAG.
Selon les photos montrant un condensateur de câble seul (sans bobines de couplage de télétransmission, l'ITS (Installation de télésurveillance, FUA en allemand) est de type radio et non inductive via boucle de traction pour ce TPH, merci à benbel pour cette confirmation et d'autres infos précieuses), la surveillance de la boucle de traction est assurée de manière capacitive.
Il s'agit d'un système de surveillance de câble tracteur conventionnel éprouvé en pratique et existant depuis longtemps et absolument pas exclusif à un constructeur de commande. Sisag AG à Altdorf est un des deux grands fabricants de commande de RM suisses, l'autre étant Frey AG à Stans qui a récemment été repris par Doppelmayr. Contrairement à Frey AG, Sisag AG est également actif dans d'autres domaines électrotechniques non liés aux RM. Sisag est le nom de la société et de désigne pas un produit de cette société en particulier.
Pour ma part je suis surpris que Sisag AG fournisse un dispositif de surveillance capacitif de la boucle de traction à un concurrent, surtout que, techniquement parlant, il s'agit d'un équipement relativement simple, principalement constitué d'un dispositif émetteur injectant capacitivement un signal basse fréquence dans la boucle de traction et d'un récepteur exécuté en redondance sécuritaire 2oo2 avec deux sorties digitales (tout-ou-rien) interfacées avec la commande de sécurité (en principe bi-canal pour l'état actif correspondant à "Non arrêt d'urgence au frein de service" en exploitation en mode normal de la commande avec l'entraînement principal en service).
Pour rappel, la surveillance capacitive de la boucle de traction permet de détecter un contact entre le câble tracteur unique ou câble tracteur supérieur et inférieur et toute partie métallique mise à la terre comme p.ex. des éléments non isolés des pylônes, sabots de stations, câbles porteurs, certaines pièces des cavaliers, etc.
Pour être précis, la surveillance capacitive est paramétrisée pour réagir à partir d'une valeur d'isolement insuffisante, il n'est pas nécessaire qu'un court-circuit de terre franc soit établi. Les tests périodiques se font d'ailleurs au moyen de résistances (parfois il y a des boîtiers test avec une sorte de grande pince crocodile pour faciliter les essais).
L'absence de câble tracteur inférieur de même que le type de boucle (avec têtes de câbles, ou sans fin avec épissure) ne joue aucun rôle pour ce qui est de la surveillance capacitive.
Ce type de surveillance du câble tracteur équipe également des funiculaires (avec ou sans câble lest).
A noter accessoirement que les "7 modes de marche" ne présentent qu'un défi technique mineur puisque principalement relatifs à une adaptation assez simple des logiciels d'application du ou des automates de sécurité assurant les fonctionnalité des répétiteurs de marche (appelés aussi communément copieurs).
Les particularité techniques discutées ci-dessus n'ont vraisemblablement p
as contribué aux causes de l'incident en question, du moins aucune information permettant de tirer des conclusions sur ce point n'est disponible.
Sauf erreur de conception et/ou d'exploitation vraiment majeure, il est très peu probable qu'un surfreinage combiné non régulé, c.à.d. dans ce cas avec vanne rapide aussi bien pour le frein de service que pour le frein de sécurité, soit survenu. Si un tel freinage combiné s'était produit, des phénomènes dynamiques assez violents ne pourraient être exclus mais comme mentionné, la probabilité de ce scénario est très faible pour une installation conçue et exploitée correctement (certaines manipulations peuvent néanmoins entraîner ce type de surfreinage).
Relativement à cette hypothèse il faudrait de plus connaître le dimensionnement effectif des deux systèmes de freinage, selon la conception de l'installation, un freinage combiné non régulé accidentel (c.à.d. avec vanne rapide pour le frein de service BB et vanne rapide pour le frein de sécurité SB) est plus ou moins admissible.
En cas de freinage non régulé, la force de freinage maximale déterminée par précharge des rondelles ressorts est appliquée (aucune contre-pression hydraulique). En raison de la petite pré-course à vide, la force d'appui des garnitures est légèrement inférieure celle qui correspondrait à la précharge des ressorts en fin de course frein ouvert; selon la conception des pinces des freins, la force de fermeture des pinces peut être différente de la force axiale de l'empilage de rondelles ressorts en raison d'un éventuel mécanisme intermédiaire (p.ex. à levier)).
Une brève évaluation des masses en mouvement tend également à démontrer que les conditions de charge ont une influence assez faible sur les masses totales en mouvement (en gros le câble tracteur, les véhicules vides, les galets, poulies et machinerie d'entraînement représentent l'essentiel des masses; la variation due à la charge est au plus 7560 kg (Voie 1: 16 personnes à 80 kg et 280 kg de charge annexe; Voie 2: 6000 kg de fret)). Les véhicules vides font 5090 kg (cabine voie 1) et 4250 kg (palonnier voie 2). Le câble tracteur pourrait lui faire dans les 33 tonnes (méthode EPFL, Estimation PiFométrique à la Louche
).
On notera en passant que l'absence de dispositif de tension en temps réel de la boucle de traction (p.ex. contrepoids ou système hydraulique actif). Aucune poulie de la boucle de traction n'est activement mobile, la position de la poulie de tension est périodiquement corrigée manuellement mais en-dehors des ces ajustements manuels la position de cette poulie demeure inchangée. On peut parler d'ancrage fixe du câble tracteur même si la terminologie semble un peu bizarre pour un câble tracteur.
Cette type de configuration très inhabituel de la boucle de traction implique des contraintes de dimensionnement qui peuvent éventuellement influencer négativement les réserves de sécurité pour ce qui est de certains modes de défaillance.
Ce message a été modifié par Velro - 30 juin 2017 - 01:11 .