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CDA espère ouvrir son capital à Fosun avant fin 2017

#1 L'utilisateur est hors-ligne   Sidious 

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Posté 11 mars 2017 - 07:07

hello,
La Compagnie des Alpes espère parvenir à un accord "bien avant la fin 2017" sur une ouverture de son capital au conglomérat chinois Fosun ainsi qu'à d'autres investisseurs potentiels, a déclaré vendredi son PDG Dominique Marcel.
...Cette opération s'est heurtée à la vive opposition des élus locaux disant refuser de "laisser brader les stations de ski françaises aux étrangers"...
CDA
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#2 L'utilisateur est hors-ligne   Argentoratum 

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Posté 13 août 2020 - 13:58

Un article du Monde Diplomatique de Juillet 2020 sur la CDA

Le Monde Diplomatique

Citation

La Compagnie des Alpes ou l’État stratège en perdition

Dans son plan de relance, le gouvernement confie un rôle majeur à la Caisse des dépôts et consignations, qui devrait investir 1,6 milliard d’euros dans la filière des loisirs. Mais cette institution financière publique agit-elle toujours pour l’intérêt général ? L’évolution de l’une de ses principales filiales, la Compagnie des Alpes, permet d’en douter.

par Barnabé Binctin & Pierre Duquesne

Quels sont les points communs entre les manèges du Parc Astérix, les téléskis de La Plagne et les statues de cire du Musée Grévin ? Coronavirus oblige, ces lieux furent tous trois fermés au public. Mais, d’ordinaire, les files d’attente qu’ils génèrent profitent à une seule et même entreprise : la Compagnie des Alpes (CDA). Méconnue du grand public, la CDA constitue un mastodonte dans l’industrie française du tourisme. Première exploitante de remontées mécaniques du monde, elle gère onze domaines skiables parmi ceux des plus grandes stations françaises, dont Tignes, Val d’Isère, Méribel, Les Ménuires, Les Arcs, Serre Chevalier. Quatrième opérateur de parcs de loisirs en Europe, elle contrôle aussi treize sites, dont le Futuroscope, Chaplin’s World, le parc Walibi Rhône-Alpes ou France Miniature. Au total, elle a enregistré vingt-trois millions d’entrées en 2019 pour un chiffre d’affaires de 854 millions d’euros (1), en constante hausse ces dernières années, avec des revenus répartis à peu près équitablement entre les deux branches d’activité.

C’est peu dire que la pandémie frappe de plein fouet la CDA et ses cinq mille emplois en équivalent temps plein. Conséquence directe de l’arrêt forcé, les actions du groupe ont dévissé, perdant la moitié de leur valeur en deux mois. Le résultat opérationnel a baissé de 29% au premier semestre (1er octobre 2019 - 30 mars 2020) (2), et le chiffre d’affaires a fondu précipitamment dans les stations de ski (-20%). Pourtant, son président-directeur général (PDG) Dominique Marcel fait preuve d’une étonnante sérénité : « C’est un choc énorme, mais nous sommes bien armés pour faire face à cette crise majeure, confie-t-il dans son bureau du boulevard Haussmann, où les peluches Astérix et Obélix dominent les toits de l’Opéra de Paris. Les Français vont moins partir, et partir moins loin : nous représentons un dépaysement de proximité, de courts séjours, qui est bien adapté à la crise post-Covid. Nous avons développé une palette de compétences et de métiers ces dernières années. Il va y avoir des opportunités pour notre groupe » La société de M. Marcel a un autre atout de taille. Elle peut compter sur l'indéfectible soutien de son actionnaire de référence : la Caisse des dépôts et consignations (CDC), l'établissement public financier qui agit pour le compte de l'Etat français et des collectivités locales. « La Caisse a toujours joué son rôle d'actionnaire stratégique et a toujours soutenu notre développement, notamment au travers d'augmentations de capital. Nous savons que nous pouvons compter sur son appui dans la période que nous traversons », ajoute-t-il en précisant qu'il n'envisage pas, toutefois, de recourir au plan tourisme lancé par le gouvernement.

Structure hybride, la CDA est une filiale (à 39,2%) de cet outil majeur de l'action publique, chargé de soutenir les missions d'intérêt général et, en même temps, une société anonyme cotée en bourse, « avec des investisseurs qui attendent un retour sur capital investi conforme à ceux du marché », rappelle M. Marcel. Cette « tension » a toujours tiraillé le groupe, de son propre aveu (3). Le rapport de forces, cependant, a quelque peu évolué. Lorsqu'elle est crée en janvier 1989, à la rescousse de stations de ski au bord de la banqueroute, la CDA fait d'abord office d'outil public pour soutenir l'aménagement des territoires de montagne. A l'époque, des sociétés privées aux manettes des remontées sont étranglées par les dettes, comme aux Arcs ou à Tignes. Comment a-t-elle ainsi muté pour devenir un empire de loisirs, expert en marketing « expérientiel » et prospectant dans le monde entier ?

Introduite à la bourse de Paris dès 1994, la jeune CDA prospère sur un trésor : les délégations de service public octroyées par les collectivités territoriales auxquelles la loi montagne de 1985 a confié la responsabilité des remontées mécaniques. Des raisons financières favorisent alors ce partenariat public-privé : « La moindre remontée mécanique vaut entre 6 et 10 millions d'euros, voire plus s'il s'agit d'une télécabine. Cela induit des durées d'amortissement très longues, qui peuvent aller jusqu'à trente ans. Ce métier ne correspond pas, a priori, à celui d'une entreprise cotée en Bourse parce que les taux de rendements ne sont pas très importants et les marges brutes assez faibles » explique Laurent Chelle, ancien membre exécutif de la CDA, aujourd'hui consultant, investi dans des projets hôteliers en montagne. Sous la tutelle protectrice de la CDC, la CDA devait permettre de mutualiser les capacités d'investissement et de gestion dans cette infrastructure de transport un peu particulière, mais structurante pour l'activité des alpins.

Un partenariat public ou des capitalistes purs et durs ?


Après un passage par Havas Tourisme, M. Jean-Pierre Sonois se voit confier la présidence de l'entreprise à sa naissance. Cet ancien collaborateur de Roger Godino - pionnier de « l'or blanc » aux Arcs et proche de Michel Rocard - imprime une toute autre démarche à la CDA. Avec le soutien de la CDC, il multiplie les acquisitions, en investissant uniquement dans les stations de haute altitude, au-delà de deux mille mètres, avec des capacités d'accueil supérieures à quinze mille lits et l'assurance d'une forte rentabilité à moyen terme. Très vite, les intentions de la CDA interrogent. « Depuis plus de dix ans que je négocie avec la CDA, pas une seconde je n'ai eu la sensation d'avoir eu affaire à un partenariat public, mais plutôt à des capitalistes purs et durs », estimait ainsi Michel Charlet, ancien maire (divers droite) de Chamonix, en 2003 (4). M. Sonois l'avait annoncé à sa manière : « D'un côté, il y a l'industrie et la compétitivité, de l'autre, l'artisanat et l'intérêt local. Notre métier, c'est l'industrie (5) ». Sur le terrain, une nouvelle approche du métier s'impose. : « Quand la CDA a débarqué, nous avons dû intégrer de nouveaux mots comme le yield management ["gestion du rendement" et donc, des prix en temps réel, induisant une tarification au siège] et le reporting ["compte-rendu de gestion"]. Deux fois par an, nous devions faire des rapports sur la question », se souvient M. Bernard Jean, alors en poste auprès de la direction de la Plagne, aujourd'hui consultant en tourisme.

En très peu de temps, la CDA a transformé le paysage des stations. Aujourd'hui, ses onze domaines skiables représentent 30% du chiffre d'affaires de l'ensemble des stations nationales, avec quatorze millions de « journées-skieurs ». Elle finit toutefois par se sentir à l'étroit. A partir des années 2000, sa stratégie évolue vers le triptyque diversification, privatisation, internationalisation. La CDA s'empare d'abord du groupe Grévin & Compagnie et avec lui, du Parc Astérix. Objectif ? Lisser le chiffre d'affaires tout au long de l'année avec des activités aux saisonnalités complémentaires, et réduire les risques d'exploitation. « La diversification vers les parcs de loisirs s'est faite avec une logique financière, et cela a laissé des traces du point de vue social, où les différences de traitement demeurent entre les deux branches, en particulier pour les saisonniers, analyse M. Mohammed Soccoba, délégué syndical CGT dans la branche loisirs. C'est aussi lié à l'histoire de la CDA : les domaines skiables gardent une dimension politique plus forte, car ils appartiennent aux communes. »

Une douzaine de parcs, trop petits et pas assez rentables, sont rapidement revendus. Dans toutes ces opérations, la puissance publique n'est jamais bien loin. Et toujours précieuse : « Le fait d'être une filiale de la CDC, avec la marque de l'Etat derrière, offre une bien meilleure garantie auprès des banques. Aujourd'hui, la CDA profite des meilleurs taux du monde ! », analyse un salarié, nouvellement arrivé. Cette socialisation potentielle des risques n'empêche pas de petits profits : lorsque la CDC veut étendre à tous les dirigeants de ses filiales, y compris aux sociétés anonymes, le plafond des rémunérations prévues pour les entreprises publiques (à 450 000 euros), elle fait ainsi face à l'opposition farouche de la direction de la CDA... qui finit par céder, en 2017.

Une étape supplémentaire vers la logique marchande est franchie le 6 mai 2004. « Le transfert au secteur privé du contrôle de la société de la CDA » est entériné par un décret (6) signé par M. Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Economie. La CDC ne conserve qu'une minorité de blocage et ne peut décider à elle seule de la stratégie du groupe. La porte est ouverte à la folie des grandeurs internationales. Elle prend d'abord la forme de missions de conseil et d'ingénierie à l'étranger, comme en Russie avant les Jeux Olympiques de Sotchi de 2014 - avec un succès tout relatif. Puis sur le marché émergent des sports d'hiver en Chine, un eldorado où la CDA rêve de se développer. Dans ce contexte s'ouvrent à la fin du quinquennat de M. François Hollande des négociations pour permettre au conglomérat chinois Fosun, déjà propriétaire du Club Med ou de Lanvin, d'acquérir 10% du capital. L'intention est double : devenir un partenaire de référence pour vendre son expertise, sur place, mais également « créer des flux de voyageurs chinois vers la France », reconnaissait à l'époque Mme Agnès Pannier-Runacher (7), énarque experte en pantouflage, alors numéro deux de la CDA et, depuis octobre 2018, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie et des finances (notamment chargée de l'approvisionnement en matériels à destination des personnels et des établissements de santé pendant la crise sanitaire).

La crise du Covid-19 pourrait bien contrarier cette obsession pour l'international

Le projet, qui aurait entériné la transformation de la CDA en multinationale, avorte finalement devant la mobilisation des élus. « Fosun ne venait certainement pas pour jouer les investisseurs passifs ! témoigne aujourd'hui M. Hervé Gaymard, président du Conseil Départemental de la Savoie, en première ligne de cette fronde. Rien ne justifiait cette ouverture aux Chinois : la CDA n'était pas sous-capitalisée, et si vraiment elle tenait à ouvrir son capital, les collectivités de montagne auraient été des actionnaires bien plus judicieux...» Une option que M. Marcel balaye d'un revers de main : « C'est une question qu'il convient de poser en priorité aux actionnaires. Jusqu'à présent, j'observe que la répartition du capital de l'entreprise a reposé sur un équilibre entre un actionnariat public, des partenaires privés et une représentation régionale significative. L'entrée de tout actionnaire supposerait qu'il s'inscrive dans la stratégie de la CDA, qui prévoit que les interventions et le développement de l'entreprise vont bien sûr au-delà de la région Rhône-alpine. »

La crise du Covid-19 pourrait bien contrarier cette obsession pour l'international. « Il est aberrant de faire venir des Chinois alors que, dans nos vallées, certains habitants ne sont jamais allés faire du ski, dénonce M. Pascal Charvaux, représentant CGT au comité de groupe. Avant, on voyait des associations qui débarquaient de Lyon avec vingt bus pleins, des classes de neige, des groupes venant avec leur Comité d'Entreprise... Le ski de proximité n'existe plus. La direction préfère ouvrir des Club Med et des centres cinq étoiles pour faire venir des gens bourrés de fric !»

Cette vision à court terme a fait rater d'autres virages stratégiques à la CDA, comme celui de la transition écologique. Certes, on « verdit » les équipements. A Tignes, la nouvelle télécabine a été pensée pour fonctionner été comme hiver, et plus seulement pour les skieurs. Mais ce sont les stations de moyenne montagne, soigneusement ignorées par la CDA, qui sont « les plus avancées pour transformer le modèle d'entreprise basé sur la monoactivité du ski en modèle multiactivités et multisaisons.», atteste Mme Armelle Solelhac, consultante en management des stations. Au contraire, la CDA continue de miser sur l'enneigement artificiel et voit plutôt dans le changement climatique une occasion économique (à court terme), car elle possède les domaines les plus élevés. Il y a deux ans, M. Marcel se félicitait de son « avantage comparatif », permettant aux stations de la CDA de « tirer leur épingle du jeu » grâce à « l'effet report des stations moins bien situées », lors des mauvaises années (8)... Mais jusqu'à quand ?

Ces orientations symbolisent le dévoiement de la CDA, qu'un ancien directeur de la CDC, fin connaisseur des rouages de l'Etat, nous résume ainsi : « la CDA n'a pas été créée pour produire des résultats sur des activités lucratives, mais pour aider et accompagner le tourisme hivernal en France. Elle a, historiquement, une vocation d'intérêt général. » L'intérêt général commande-t-il de renforcer toujours plus une emprise touristique industrielle qui détruit les plus beaux sites de montagne pour faire venir de très loin une clientèle hors sol ? Les promesses de démocratisation des activités récréatives et d'émancipation par le temps libre semblent bien loin des préoccupations de ce type de structures paraétatiques.

(1) Chiffres officiels du groupe, pour l'exercice clos au 30 septembre 2019, www.compagniedesalpes.com
(2) Communiqué de presse, 26 mai 2020
(3) Rapport au Parlement de la commission de surveillance de la Caisse des Dépôts et consignations, 2018
(4) L'Expansion, Paris, octobre 2013
(5) L'Express, Paris, 13 février 1997
(6) Décret n°2004-398, publié au Journal Officiel
(7) Rapport précité
(8) Ibid


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