LETTRE OUVERTE D'ISABELLE MONSENEGO CONSEILLERE MUNICIPALE A MONSIEUR LE MAIRE DE COURCHEVEL
Courchevel le 8 Avril 2021,
OBJET : Demande de retrait des délibérations 344-2019 du 19 Décembre 2019 et 58-2021 et 59-2021 du 24 Mars 2021
Monsieur le Maire,
Je vous adresse cette lettre ouverte pour que vous reveniez sur les délibérations visées en référence , que je juge illégales, pour les motifs ci-après exposés, et qui n’ont d’autre objet que de permettre à la SNC SOLIERES, société de la sphère de l’empire de Stéphane COURBIT, de s’approprier des droits à construire à bas prix au détriment des intérêts de la commune et de ses contribuables et essayer de régulariser à postériori des infractions caractérisées et délibérées aux règles d’urbanisme
Je me permets de faire un bref rappel des dates que je connais, à force de solliciter les documents auxquels j’avais droit en ma qualité d’élue, mais que vous ne m’avez délivrés que très partiellement et avec beaucoup de réticences.
Nous avons été élus en juin 2020 et dès le mois d’aout 2020 je vous ai alerté de l’existence au JARDIN ALPIN d’une construction totalement illicite de la part de la SNC SOLIERES.
En effet alors que cette construction avait commencé dès septembre 2019, un permis de construire portant sur 3 chalets hôteliers, déposé semble-t-il le 6 novembre 2019, a reçu un avis défavorable en commission d’urbanisme le 5 aout 2020 principalement car ledit permis utilisait les règles du PLU applicables aux hôtels alors que les plans démontraient qu’il s’agissait de chalets.
La notion de chalets hôteliers n’existe pas dans notre PLU.
Cette commission houleuse, au cours de laquelle votre position visant à insister à donner néanmoins un avis favorable, m’a interpellée.
En réalité la SNC SOLIERES a acquis les parcelles 161 et 241 avec un permis de construire pour la réalisation de deux chalets d’une surface de 2.219 m2 et une parcelle 394 sur laquelle la SNC SOLIERES avait obtenu un permis de construction d’un chalet de 757 m2 soit au total 2.976 m2.
Elle avait affiché ces deux permis mais construisait en réalité sur la base de plans totalement différents.
En effet la SNC SOLIERES , dès le début de ses terrassements démarrés en septembre 2019, construisait trois chalets d’une surface de 6.200 m2 sans aucun permis de construire et pour cause !!!!!!!
La configuration du terrain et des constructions ne le permettaient pas dans le respect du PLU. Les règles d’emprise au sol, de hauteur et de prospect ne sont pas respectées et ne pouvaient l’être.
Les photos parlent d’elle-même.
Il a été alors imaginé par l’ancienne équipe municipale, dirigée par Philippe MUGNIER et son adjoint à l’urbanisme de l’époque , de procéder par délibération 344-2019 en date du 19 décembre 2019 au déclassement du domaine public sans enquête publique de 464 m2 aux motifs (erronés d’ailleurs) que ce déclassement ne portait pas atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation de la voierie.
Bien entendu, à aucun moment il n’a été mentionné et expliqué que ce déclassement devait permettre de consentir ultérieurement une servitude de cour commune qui n’était envisageable que si préalablement il y a « déclassement préalable du domaine public ».
En effet une servitude de cour commune ne peut être donnée sur du terrain du domaine public de la mairie.
Cette délibération a donc été obtenue par fraude des droits d’information des contribuables et peut donc encore être annulée car en plus elle nécessitait une enquête publique.
Donc lorsque vous dites que vous ne faites qu’appliquer ce qui a été décidé par l’ancienne municipalité c’est tout simplement inexact.
La précédente municipalité a préparé l’opération en déclassant le domaine public.
Mais c’est vous, et votre conseil, qui consentez la servitude dans son emprise ainsi que son montant et essayez de régulariser à posteriori par tous moyens et en toute connaissance de cause une construction illicite.
Devant votre inertie et malgré mes demandes en aout, septembre et octobre 2020 derniers auxquelles vous n’avez pas répondu, je vous indiquais que je ne pouvais accepter un tel comportement en tant qu’élue et vous ai indiqué que je me devais de saisir le Procureur de la République et le Préfet.
Vous avez alors été obligé de dresser un procès-verbal d’infraction le 23 octobre 2020. Mais vous n’avez aucunement arrêté le chantier comme vous le prétendez.
J’ai donc saisis le Procureur de la République et le Préfet le 5 novembre 2020.
Ce sont les gendarmes qui ont arrêté le chantier début février car vous n’aviez rien fait depuis octobre 2020.
Au contraire vous avez pris un nouvel arrêté 06-2021, le 12 janvier 2021, (qui n’a pas été affiché de façon visible), pour décider de délaisser encore 8 m2 de domaine public dans le virage. Sans doute encore indispensable à l’adaptation du terrain à la construction existante.
Vous vous apprêtez maintenant à donner, dans votre logique, le nouveau permis de construire à la SNC SOLIERES qu’elle a déposé (le 15 mars 2021 semble-t-il) alors que sa construction est presque finie.
Les électeurs contribuables (les miens mais aussi les vôtres) sont choqués de ces situations illégales majeures que vous cautionnez et croyez pouvoir régulariser en triturant les textes légaux et les principes d’égalité des citoyens devant la loi.
En effet, alors que vous devriez solliciter la démolition de ces constructions monumentales à plus de 13,50 m de hauteur et sur toute l’emprise du terrain, et saisir le Procureur de la République au nom de la commune, vous avez décidé de faire voter la constitution d’une servitude de cour commune.
Le 23 février 2021 votre majorité a voté contre la servitude de cour commune et la convention tourisme.
Après sans doute recadrage de vos troupes, le 24 mars dernier une convention tourisme encore plus défavorable à la commune que celle présentée le 23 février et une servitude de Cour commune ont été adoptées.
Il vous a fallu vous y reprendre à deux fois, pour faire voter un tel cadeau, étant précisé que mon intervention et opposition, et celle de Lucien CORDEL a permis d’augmenter, en un mois, l’offre de la SNC SOLIERES de 1 500 000 euros.
Cette stratégie n’est pas admissible pour les raisons suivantes :
- Vous créez un précédent et la Commune ne pourra dans l’avenir qu’envisager avec beaucoup de complaisance les futures constructions illégales qui pourraient se prévaloir du même traitement que celui réservé à la SNC SOLIERES.
- Vos décisions, sous réserve qu’elles soient jugées légales, permettraient à la SNC SOLIERES de construire plus de 3.220 m2 qui n’auraient pas dû être construits.
- Situés au Jardin Alpin où le prix du mètres carré se négocie aux alentours de 30 000 euros le mètres carré, c’est un profit de 96 720 000 d’euros brut que vous permettez à la SNC SOLIERES de réaliser.
Sans compter que le prix du terrain acheté a été forcément adapté à une constructibilité de moins de 3000 m2.
- On tombe sous le coup de la rupture d’égalité de traitement entre les contribuables car ceux qui ne respectent pas les dispositions du PLU se voient sanctionnés normalement par l’application du droit.
- La poursuite d’un intérêt étranger à l’intérêt général me semble caractérisée voire le délit prévu par les articles 441-5 al 1 et 2 1ER et 2eme et suivants du code pénal qui dispose :
« Le fait de procurer frauduleusement à autrui un document délivré par une administration publique aux fins de constater un droit, une identité ou une qualité ou d'accorder une autorisation est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise :
1° Soit par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant dans l'exercice de ses fonctions ;
2° Soit de manière habituelle ; »
Je ne comprends pas votre empressement à faire régulariser de telles infractions d’autant que la prudence devrait s’imposer eu égard aux condamnations pénales déjà prononcées pour abus de faiblesse de certains bénéficiaires de ces opérations.
Une association de contribuables et des contribuables individuellement souhaitent se joindre à mes demandes et sont prêts à aller en justice.
Avant de diligenter les procédures adaptées à la situation décrite, je vous demande de bien vouloir procéder au retrait des délibérations ci-dessus visées et de ne pas délivrer le permis de construire que la SNC SOLIERES demande basée sur ces délibérations dont l’annulation va être demandée.
Je sollicite une concertation rapide, dans un délai de 15 jours au-delà duquel je saisirai les différentes juridictions, concertation dans laquelle vous associerez les élus opposants pour essayer de trouver une solution amiable avec la SNC SOLIERES dans l’intérêt général exclusif de la commune.
Je suis contrainte d’adresser copie à nouveau à Madame le Procureur de la République et à Monsieur Le Préfet lequel dispose d’un droit de contrôle de légalité à posteriori sur les délibérations municipales.
Je vous prie Monsieur le Maire, d’accepter mes respectueuses salutations.
Isabelle MONSENEGO TISIC
Ce message a été modifié par Persil - 13 avril 2021 - 23:53 .