Concernant le projet Câble A entre Créteil et Villeuneuve St Georges, un article des Echos ce 28/05/2019 :
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Par Marion Kindermans : Publié le 28/05
L'Ile-de-France s'offre sa première télécabine
Le téléphérique Câble A, qui doit relier Créteil à Villeneuve-Saint-Georges, attend le feu vert de la commission d'enquête. En cas de succès, il symbolisera la réussite d'un transport urbain qui a pour l'instant de la peine à décoller. Selon une étude d'Ile-de-France Mobilités, seuls trois ou quatre seraient faisables sur la douzaine de projets portés par les villes autour de Paris.
Le Câble A, qui doit relier Créteil à Villeneuve-Saint-Georges en quatorze minutes, dans le Val-de-Marne, concentre tous les regards. Il devrait être la première télécabine réalisée en Ile-de-France, et la plus complexe en France. L'enquête publique, qui a démarré le 25 mars , vient de s'achever. Chacun est suspendu à l'avis rendu par la commission d'enquête, pour fin juin-début juillet, qui, si elle est favorable, aboutira à la déclaration d'utilité publique. Ce qui marquerait enfin le lancement de ce téléphérique de 4,5 kilomètres de long dans les cartons depuis une dizaine d'années, et qui doit traverser les communes de Villeneuve-Saint-Georges, Limeil-Brévannes, Valenton, et Créteil, dans le Val-de-Marne.
Les choses ne sont pas faites pour autant. L'association de riverains des Sarrazins, à Créteil, aux premières loges du câble, s'y oppose. « L'enquête publique a montré que 80 % des 800 avis étaient positifs, nous sommes très confiants », rétorque-t-on chez Ile-de-France Mobilités (IDFM).
S'il passe les étapes, le Câble A marquera une rupture dans les téléphériques français. C'est une véritable ligne de transport qui sera réalisée avec 5 stations, chacune équipée d'un hall d'accueil, d'un espace de validation et de quais pour l'attente. Il sera connecté au métro ligne 8 de Créteil-Porte du Lac. Plus d'une centaine de cabines, passant toutes les 20 à 30 secondes, permettront d'embarquer une dizaine de personnes, seule alternative possible pour franchir à la fois la RN406 et le faisceau ferroviaire. Le coût : 132 millions d'euros, financés par l'Etat, la région, le département. Moins cher qu'un tramway mais plus qu'un bus.
« Avec le Câble A, on aura enfin un référentiel en France, cela donnera des idées, les téléphériques entreront dans les moyens de transport en commun publics » déclare Fabien Abinal, à la tête du cabinet Eric, spécialisé dans les études des installations à câble. Le téléphérique de Brest, ouvert en 2016 pour traverser la rade, étant techniquement beaucoup plus simple.
Le Câble A fait partie des rares projets retenus par Ile-de-France Mobilité, l'autorité organisatrice des transports. Ils sont une douzaine tels Achères - Conflans-Sainte-Honorine, Goussainville - Charles-de-Gaulle, Plateau de Saclay, Bagnolet, ou Pont de Sèvres -Vélizy, lancés par les élus qui ont cru y voir le transport miracle. Seuls 2 ou 3, en dehors du Câble A, passés au crible d'une étude de faisabilité et socio-économique rendue il y a quelques mois, ont trouvé grâce aux yeux d'IDFM. Mais impossible de savoir lesquels. Des discussions sont en cours avec les élus.
La difficulté est que ces projets, efficaces pour traverser des fractures urbaines (routes, faisceau ferroviaire, fleuve…) sont complexes techniquement. Et le coût souvent sous-estimé, avec l'aménagement de l'intermodalité, des accès, des stations. « On est monté in fine sur certains projets à 150 millions d'euros », glisse Elodie Hanen, directrice générale adjointe en charge du développement chez IDFM. Le Câble A a un taux de rentabilité de 11 %. Mais c'est loin d'être le cas pour d'autres.
Les fabricants, eux, fourbissent leurs armes. Le trio Eiffage, Poma, et RATP, ont lancé en novembre 2018 une offre commune de transport par câble urbain. Tout comme Keolis, filiale de la SNCF. L'enjeu : rivaliser d'innovation technique et d'imagination pour rendre le téléphérique de ville plus design que celui de montagne.
Avec une interview du dirigeant du cabinet Eric :
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Par Marion Kindermans
Pourquoi tant de projets dans les cartons et si peu de câbles réalisés ?
Les câbles en milieu urbain sont un moyen de transport nouveau en France. Il y a une forme d'appréhension liée au survol, à la visibilité depuis les cabines, à la sécurité du système. Le fait que plusieurs dossiers soient en gestation , que ce soit long, est inhérent aux projets de transports, qui sont soumis à des procédures administratives lourdes. Un écrémage a eu lieu. Mais aujourd'hui, nous entrons dans le dur. Nous n'en sommes plus à l'analyse de la faisabilité des dossiers mais à des stades bien plus avancés avec lancement des travaux. Ceux du câble de Toulouse vont démarrer à l'été. Le commissaire enquêteur a rendu un avis favorable. Celui de Saint-Denis, à la Réunion, va entrer en chantier prochainement. La consultation pour la réalisation va être bientôt lancée à Grenoble. A Ajaccio aussi. Et le Câble A est un projet très attendu. Dans cinq ans, on verra plusieurs câbles en villes en France. Dans les années 1980, ça n'était pas gagné de relancer le tramway. Toutes les communes n'en ont finalement pas eu. Le téléphérique, c'est la même chose.
En quoi sont-ils complexes à monter ou à financer ?
Certains ont pensé qu'il suffisait de transposer les coûts du transport par câble de montagne à celui en milieu urbain. Or c'est forcément plus cher. Il faut réaliser des stations, en gérer les accès en faisant des circulations, des ascenseurs, créer des espaces d'attente couverts, des contrôles d'accès, assurer l'intermodalité du câble. Mais cela reste moins cher que de faire un tramway. Autour de 50 millions pour Saint-Denis ou 55 millions pour Grenoble. C'est une bonne solution lorsqu'il s'agit de franchir une voie d'eau comme le câble de Brest ou le projet de Grenoble qui franchirait deux rivières en évitant de construire un pont, ou encore le câble A qui permet de passer un faisceau ferroviaire, des routes. Le câble est pertinent dans de nombreuses situations, mais penser que le câble est la solution à tout est utopique.
Est-ce que les textes réglementaires permettent désormais son développement ?
Oui, nous sommes désormais sereins en France pour monter des projets. Deux éléments ont levé les verrous : d'abord l'ordonnance du 18 novembre 2015 qui instaure une servitude d'utilité publique de libre survol pour les transports urbains par câble, ce qui évite les expropriations systématiques lorsqu'il y a une déclaration d'utilité publique du projet. Et puis l'évolution de la réglementation technique a permis aujourd'hui de bien adapter les règles en matière de sécurité au contexte urbain.