Tony le savoyard, le 15 avril 2024 - 17:37 , dit :
Je me permet de témoigner au sujet du ski et du réchauffement climatique :
Depuis un an et demi (voire 2 ans), avec mon papa, on a un projet d'acheter un appartement dans un ancien hôtel à Plainpalais, dans les Bauges (fermé depuis la fin des années 90' et abandonné par le propriétaire depuis 18 ans). Nous avons attaqué les travaux à la fin du mois d'Octobre 2023 pour une durée de 4 mois (la partie intérieur) et on vient de commencer la terrasse seulement ce week end, en parrallèle des finitions. En ayant passé tout les week end de cette hiver là haut, je peux vous avouer qu'en 13 ans, on n'avait jamais vu une saison hivernale SANS neige (même si c'est "juste" quelques centimètres). Le domaine alpin de Savoie Grand Revard a dû ouvert juste quelques semaines. Lors du redoux en début février dernier, il n'a plus de neige à la Féclaz qu'on voyait le gazon au secteur nordique du Plateau Sud.
Pendant ces deux dernier jours, on était à Plainpalais pour commencer à faire la partie extérieur de l'appartement afin de louer à ceux qu'ils veulent d'ici cette été et il faisait une chaleur écrasante, tellement que je me suis mis en bernuda à 1100 mètres d'altitude à la mi-avril !!!
Si j'ai écris en longueur, c'est que je suis vraiment inquiet pour la station de la Féclaz, tellement que je n'arrive plus à reconnaitre ce coin.
Un constat malheureusement partagé partout.
Constat qui est d'ailleurs clair :
- Très grosses difficultés d'enneigement en basse et des saisons en dents de scie en moyenne montagne
- Bétonisation à outrance qui continue (notamment en Tarentaise)
- Records de températures au niveau local sur certaines journées, mais aussi au niveau national sur des mois et des mois consécutifs
- Enneigement en haute montagne en début de saison plus forcément garanti (heureusement cette année si)
- Difficultés en eau à l'approche de l'été (heureusement là encore pas cette année, mais c'était le cas les années précédentes)
- Difficultés d'enneigement stable sur la durée en haute montagne (2 années de suite qu'on voit les pistes tourner en Février / Mars avec l'aide des canons, mais des alentours de pistes très verts, sauf pendant les quelques jours qui suivent une chute. On avait un tapis stable avant...)
- Bouchons en hausse et qui atteignent un niveau de paralysie catastrophique (non 8h pour faire Chambéry <> Bourg-Saint-Maurice n'est pas acceptable, ni pour les vacanciers, ni pour les locaux, ni pour les professionnels du tourisme, ni pour les stations...)
- Des stations qui même à 1600m peuvent se retrouver facilement sans neige en pleine période traditionnellement blanche (je parle bien des stations en elles-mêmes et pas du ski. Pour moi la magie de la montagne c'est aussi l'environnement tout blanc partout avec des raquettes, du ski de fond, de la luge en station, des batailles de boules de neige, pas juste skier)
- De plus en plus de difficultés à garantir une fin de saison en alpin (post-mars ça commence à se complexifier malheureusement)
- Prévisions alarmistes sur l'enneigement à court terme en basse montagne, à moyen terme en moyenne montagne et à long terme en haute et très haute montagne
Je pense qu'à moins d'être très aveugle on fait tous ce constat à des degrés plus ou moins divers. La question maintenant c'est que faire ? Tout arrêter est facile à dire quand on voit le niveau des investissements et des gens qui vivent de l'or blanc. La manne financière est énorme. Mais l'espoir vient aussi de la fréquentation l'été : les gens aiment la montagne et découvrent la magie de celle-ci hors ski. Alors la reconversion est possible. En plus, dans une transition douce (inévitable parce que tout arrêter d'un coup c'est bien trop brutal) on a de la chance d'avoir des remontées globalement neuves, rationalisées, qui sont optimisées niveau consommation et qui peuvent très bien faire tourner un bike park ou monter des piétons en randonnée. En plus pas besoin de les exploiter à fond en vitesse ni en nombre de sièges/cabines.
Certaines stations semblent faire le choix d'exploiter le filon jusqu'au bout, avec un pic inflationniste qui arrivera forcément (du ski dans moins de stations, sur une période plus courte = énorme demande pour une disponibilité légère, ça va faire mal). D'autres ont déjà entamé la transition.
Et nous, peut-on agir ? Théoriquement oui, parce qu'on peut sensibiliser, alerter (sans filer dans une paranoïa non constructive) et essayer d'accompagner. Mais en réalité pas tant que ça. A moins d'être un directeur de station ou d'une entreprise influente du secteur de la montagne, ça va être compliqué de changer les investissements. Les locaux ne vont pas se tirer une balle dans le pied aux municipales (et comme les résidents secondaires ne peuvent pas voter, ils n'auront pas d'impact). Les élections nationales ont trop de paramètres différents pour influer, en plus tout peut changer vite. Et la politique générale y sera pour beaucoup dans les actions futures (les règlementations, les constructions, les infrastructures d'accès...). Bref, j'avoue que je tourne un peu en rond dans ma tête. Comme l'impression de voir la chose arriver, de ne pas assez en faire mais de se dire d'être impuissant à en faire plus.
Pour reprendre le sujet des JO, je n'en voudrais à personne de s'y opposer. Pour moi, c'est un rêve. Mais la situation en 2030, j'ai du mal à l'anticiper. Et des jeux sur neige artificielle, ça ne me fait pas rêver. Surtout pour le ski de fond / biathlon.