Je reviens un instant sur l'implantation de Poma aux USA et, au-delà, sur les sociétés de Laurence Jump (Pomalift Telecar)...
La première remontée Poma du continent nord américain fut construite en 1952 : il s'agissait d'un téléski à Sainte Agathe dans les Laurentides (Canada), installé sous licence Poma par le bureau de Barton (Ontario) de British Ropeway (Breco).
Aux USA, en 1953, Laurence Jump, PDG d'Arapahoe Basin, rencontra Jean Pomagalski pour la construction d'un premier téléski Poma dans sa station et ouvrit en juin 1954, un bureau commercial officiel Poma à Denver : Pomalift Inc. Parallèlement, à l'Est du pays, la station de Suicide Six s'équipait également d'un appareil du constructeur français et une structure commerciale Poma fut créée à Woodstock. Celle-ci devint en 1962 Poma Aerial Tramway Inc. gérée par Bill Alsup, que Bernard Pomagalski, le fils de Jean, avait rencontré à Aspen où il était pisteur.
Laurence Jump était particulièrement actif et, au-delà de l'installation de simples téléskis, cherchait a développer son activité en proposant également des téléportés. Jean Pomagalski ne construisant alors que des téléskis, le mit en relation avec
Ugo Carlevaro qui avait mis au point avec Felice Savio une télécabine débrayable en 1949 à Alagna et déjà concédé en France une licence à l'entreprise grenobloise Câbles & Monorails détenu par la famille Mancini qui l'employa pour la construction de la première télécabine de France à Villard-de-Lans (la
TCD2 de la Cote 2000).
Jump acheta à son tour la licence Carlevaro & Savio et livra en 1957 aux USA sous la marque "Telecar Inc." la télécabine biplace Wildcat dans le New Hampshire, première télécabine débrayable des USA.
Voici une publicité Telecar Inc. de 1958 : on remarque au passage le photomontage qui reprend la perspective sur la Mer de Glace vue depuis la ligne de la TCD2 Câbles & Monorails de l'Index à Chamonix :
Je suppose que c'est cette volonté du bouillonnant Jump d'élargir sa gamme qui décida le non moins bouillonnant Jean Pomagalski à développer un véritable produit télésiège. Le grenoblois avait déjà livré le
TSF1 Altitude 2000 à Planpraz en 1955 (d'ailleurs en s'associant avec Carlevaro & Savio) mais il s'agissait d'un petit appareil prototype monoplace avec des pylônes et potences issus de la gamme de téléskis. Jean Pomagalski mit ainsi au point entre 1958 et 1959 un véritable produit TSF2 standardisé.
Et c'est bien du côté des USA et de Jump qu'il faut regarder pour trouver les premiers appareils construits, 1 an avant les deux premiers exemplaires français (TSF2 du Glacier des Bossons à Chamonix, et TSF2 de la Combe des Juments à La Clusaz) : dès 1959, cinq exemplaires furent livrés outre-Atlantique. Ci-dessous le TSF2 du Mount Alyeska (USA - Alaska) ouvert en 1959 :
(Coll. Laurent Berne)
Si les pylônes en fût étaient déjà de rigueur comme sur le Becker Double de Snow Basin ou au Mount Alyeska en Alaska, le TSF2 Killington Peak se distinguait pour sa part par ses pylônes en treillis : Pomalift-Telecar disposant de la licence Carlevaro & Savio, Laurence Jump n'avait pas hésité à mixer les éléments issus des deux constructeurs européens.
(collection Laurent Berne)
(Denver Public Library)
En 1968, Pomalift inc. jusqu'alors bureau indépendant, fut racheté par Poma. Deux ans plus tard, Pomalift et Poma Aerial Tramway (le bureau de Woodstock) fusionnèrent avec le constructeur Heron au Colorado pour former Heron Poma Company.
A la tête de Heron Poma, l'ingénieur Erwin A Reschke conserva une gamme historique de télésièges Heron mais commercialisa également des remontées de conception Poma française : des téléskis débrayables, des télésièges biplaces, mais aussi des télécabines. Heron Poma livra ainsi en 1973 à Big Sky dans le Montana, la TCD4 Gondola 1, premiers "œufs" SP4 à pinces S des USA.
TCD4 Gondola 1 à Big Sky (DR)
La société fut cependant dissoute dès 1974, année extrêmement difficile pour le marché américain des remontées mécaniques. Les remontées Poma des Etats-Unis furent alors distribuées par Pomagalski Inc, basé à Engelwood dans le Colorado.
Pour renforcer sa présence sur le marché nord-américain, Poma fusionna en 1981 Pomagalski Inc et le bureau Canapoma Inc. qui existait déjà au Quebec (Canada) au sein d'un nouveau groupe : Poma of America.. Pour être réactif et concurrentiel, le constructeur isérois ouvrit en 1983 à Grand Junction (Colorado) le site de production que l'on connait aujourd'hui.