Le ski, les stations et les remontées mécaniques ne seraient pas ce que nous en connaissons si, dans les temps héroïques (et notamment, dans les années 1930), des gens courageux, opiniâtres, imaginatifs et bricoleurs ne s'étaient pas acharnés à créer, construire et exploiter des installations défiant souvent la logique. Ces pionniers, le plus souvent montagnards de naissance et d'habitat, devenus skieurs par amour du défi et du risque, rêvaient des aménagements qu'ils pourraient inventer pour dynamiser ce qui apparaissait comme devant être le "phénomène des sports d'hiver". Qu'ils soient Français, Suisses, Autrichiens, Italiens ou autres, leur culture et leur profil étaient similaires et se conjuguaient sur le thème : "y faut y aller !".
Ecoutons René PASTORE, né en 1913, skieur dès le début des années 1930 et créateur de stations en Haute-Savoie :
"J'ai commencé le ski en 1930 et comme on n'avait pas beaucoup de sous, on montait presque toujours à pied sauf quand on pouvait resquiller une montée sur un funiculaire. Jean Pomagalski qui venait souvent skier avec nous en avait assez de perdre du temps à grimper comme ça et, un jour, on a rencontré un type qui avait un système de câble pour transporte des billes de bois. Il nous a autorisés à nous accrocher au câble pour monter la pente et c'est comme ça que l'idée est venue à Jean Poma d'inventer des remontées mécaniques. L'ami Servettaz, de la station des Gets, avait vu à l'Alpe d'Huez un "téléski" construit par le père Mourra (ou par Jean Poma, on ne sait pas trop !) et depuis, il parcourait les forêts de sapin en disant "regardez tout ce stock de pylônes...". Au Carroz d'Araches qui voulait devenir station, il y avait un seul téléski, un Constam qui avait fait un accident. Alors moi, j'ai appelé Jean Poma et on a discuté sur des paperasses : les droits de passage, les dossiers pour les Ponts & Chaussées où l'ingénieur divisionnaire disait de Poma : "c'est un petit inventeur qui a provoqué un accident et qui fait faire par d'autres ses soit-disant téléskis : ici, c'est Constam et rien d'autre". Mais tout s'est arrangé et on a fini par construire du Poma. Après ça, il m'a demandé si je connaissais d'autres coins à équiper et on est montés à Samoëns. On a construit une remontée qui a "fait de l'or" parce qu'il y avait toujours de la neige et que les clients y venaient en grand nombre. Après, pour faire d'autres remontées, les difficultés manquaient pas : les paysans mettaient du fumier sur les pentes pour faire fondre la neige plus vite et ils clôturaient en travers des pistes. Des ennuis mécaniques aussi, les gosses lâchaient pas les perches et faisaient le tour de la poulie retour, le câble déraillait souvent, les équipements électriques n'étaient pas bons... On a eu aussi, bien souvent trop de neige tombée dans la nuit et elle pouvait monter jusqu'au câble qu'il fallait sortir à la pelle. Pour compléter le tableau, les puritains américains ont fait savoir qu'ils désapprouvaient les téléskis car, ils disaient, mettre une perche entre les jambes étaient un système moralement suspect !!! Bref, c'était pas toujours facile mais c'était tellement passionnant".
Origine document : "La saga des remontées mécaniques", P. Ratinaud - J. Lesage
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Ce que racontent les pionniers Réf.20033
#2
Posté 06 mai 2023 - 21:44
ainsi je regarde avec moins mauvais oeil les téléskis à Poma.
les perches entre les jambes, c'étout surtout mal-aisé, et j'avais aussi de la peine tout seul sur un "cintre", qui pendait fort d'un côté, à me laisser tomber.

les perches entre les jambes, c'étout surtout mal-aisé, et j'avais aussi de la peine tout seul sur un "cintre", qui pendait fort d'un côté, à me laisser tomber.
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