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Les stations ne font plus de folies
par La Rédaction du DL | le 12/02/09 à 07h17
Fini le temps où les dépenses explosaient... L'époque ne le permet plus, comme le prouve une récente enquête.
Un document qui offre une véritable "photographie" de l'économie de montagne.
Le paradoxe est saisissant. La très belle saison réalisée l'hiver dernier par la plupart des stations françaises ne les a pas conduites à faire exploser leurs dépenses. Au total, elles ont investi 298 134 000 euros dans leurs domaines skiables en 2008. C'est 10,65% de moins que l'année précédente (333 686 000 euros).
Plus étonnant: cette baisse en est à sa troisième année consécutive. Ce constat et les chiffres sur lesquels il s'appuie constituent le principal enseignement de l'enquête minutieuse réalisée par le magazine Montagne Leaders.
"Trois années de recul consécutives, il y a bien longtemps que je n'avais pas vu ça", reconnaît Michel Drapier, directeur de la rédaction et observateur avisé de l'aménagement de la montagne depuis une trentaine d'années.
Certes, les remontées mécaniques proprement dites parviennent encore à échapper au phénomène. En valeur, les dépenses qui leur ont été consacrées progressent même légèrement.
L'inquiétude résiderait plutôt dans la baisse du nombre d'appareils neufs mis en service. Jamais, depuis 1999, il n'avait été aussi bas. Les skieurs n'en ont trouvé qu'une quarantaine cet hiver. Il y en avait eu 53 l'an dernier. Et 69 en 2004, qui constituait une année record.
Pour 2008, la facture totale de construction d'engins à câble dans les différents massifs s'élève à 133 277 000 euros, dont près du tiers concentré dans trois stations: Chamonix, en Haute-Savoie (avec sa nouvelle télécabine de Planpraz, qui remplace une ancienne installation), Montgenèvre, dans les Hautes-Alpes (qui s'offre deux télémix), et Super Besse, dans le Massif Central (qui, après avoir doublé son chiffre d'affaires depuis 2002, construit un Funitel, sorte de très grosse télécabine dont on n'avait pas connu de nouvel exemplaire en France depuis sept ans).
Ailleurs, (Superdévoluy, Tignes, Val Cenis) les télésièges débrayables, qui allient confort et débit élevé tout en évitant d'avoir à déchausser les skis, continuent à avoir du succès. Il s'en est toutefois construit presque deux fois moins que l'an dernier (sept contre treize).
Mais si les remontées mécaniques se maintiennent à peu près, la baisse globale des investissements se niche dans tous les autres postes, qui représentent la moitié du total.
Exemple: la neige de culture (la fameuse neige artificielle). Dans ce domaine, les dépenses fléchissent de près de 20%. La Haute-Savoie n'a dépensé que 5,51 millions d'euros pour accroître son arsenal de canons à neige, contre plus du double en 2007.
Une forme de maturité
Constat quasi-identique du côté des équipements de billetterie (ceux qui permettent de vendre les forfaits, mais également ceux qui permettent de les "lire" sans que les skieurs aient besoin de les exhiber, en les sortant de leur poche.) Ils dévissent de près de 15%. Et le trait peut encore être accentué si l'on regarde du côté des dépenses en signalétique sur les pistes: elles s'effondrent de près de 30%. En fait, seul le marché des engins de damage tire son épingle du jeu avec une variation positive de presque 12%.
Bref, les responsables de stations françaises affichent une certaine "prudence".
Faut-il pour autant s'en affoler, au risque de faire passer la montagne française pour une énième sacrifiée de la crise? "Je pense que c'est la fin d'une époque, explique surtout Michel Drapier. Aujourd'hui, la durée de vie d'une remontée mécanique est de 30 à 35 ans. Avant de se lancer dans sa construction, tous les exploitants se demandent à quoi elle servira dans trois décennies".
Les stations seraient-elles donc devenues plus raisonnables, moins portées sur la "course aux armements" qu'hier ? C'est un peu l'avis de Gérard Perrissin-Fabert, maire du Grand-Bornand (Haute-Savoie) depuis mars dernier. Cet automne, sa station s'est dotée d'un nouveau télésiège à six millions d'euros, tout en réduisant sensiblement la note par rapport à un précédent projet. "Il y a un contexte global que l'on ne peut ignorer. Je crois, dit-il, que l'avenir sourira aux stations qui sauront être raisonnables dans leurs investissements tout en tenant compte des nouvelles aspirations de leur clientèle".
Bref, plus que devenir des victimes de la conjoncture, les stations sont plutôt en train d'atteindre une forme de maturité... "Je vois mal un groupe comme le nôtre cesser d'investir chaque année près de 30% de son chiffre d'affaire (45 M€) souligne Jean-Yves Remy, patron de Labellemontagne, qui exploite huit stations, des Vosges aux Hautes-Alpes. Lorsque nous reprenons des délégations de service public dans des stations, la modernisation des installations fait partie de l'objet de la DSP. Notre mission est donc de les réaliser." Le groupe, qui se prépare à une augmentation de capital, a beaucoup investi ces deux années. Et il prévoit de le faire encore l'an prochain à Notre-Dame-de-Bellecombe, Saint-François-Longchamp ou encore à La Bresse. À Orcières-Merlette, le prochain gros programme est déjà prévu pour 2012/2013. "Comme nous travaillons sur le long terme, notre rôle est de lutter contre l'obsolescence commerciale de nos équipements".
Une mission qui sera celle de toutes les stations dans les années à venir.
POUR EN SAVOIR PLUS
Le dernier numéro de Montagne Leaders, en kiosque en station.
REPÈRES
L'AVENIR PASSE-T-IL PAR LE TÉLÉMIX?
Apparu dès 2003, cet étonnant engin hybride est en ce moment la coqueluche des stations. Sur un même câble, il fait cohabiter des sièges -comme sur un télésiège - entre lesquels s'intercalent à intervalles réguliers des cabines - comme sur une télécabine. Avec Orcières, la station la plus équipée d'Europe, le groupe Labellemontagne s'en est fait une "spécialité", "même si ça coûte 30% plus cher qu'un télésiège classique" compte Jean-Yves Remy.
COMBIEN COÛTE UNE REMONTÉE MÉCANIQUE?
Tout dépend évidemment de la longueur, du nombre de places et du dénivelé. Mais vous pouvez vous offrir un télésiège non débrayable pour 1,8 à 3,5 millions d'euros. Pour un télésiège débrayable, comptez entre 2,7 et six millions d'euros. Entre sept et neuf millions pour un télémix. Enfin, pour une télécabine de plus de 900 mètres de dénivelé, comptez 13 millions d'euros.
Le lien:
http://www.ledauphine.com/economie-les-sta...p;article=99514
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