
3 Mai 1946. Francis Eugène Mugnier, maire de Saint Bon, signe, avec l’accord de son conseil municipal, la cession de terrains communaux au département de la Savoie qui projette la création d’une station de sports d’hiver au Plateau des Tovets à 1750 mètres d’altitude. Courchevel est née. Ce sera la première et unique station dite de 2ème génération et la première créée ex-nihilo sur un concept skis aux pieds. L’idée est de créer une station sociale, permettant l’accès au ski au plus grand nombre. Mais le développement de la station au cours des décennies qui vont suivre, va se faire à l’opposé du projet initial, et aboutir au Courchevel d’aujourd’hui, station internationale réputée pour ses prestations très haut de gamme qui font trop souvent oublier la qualité exceptionnelle de son domaine skiable.
Durant de nombreuses années, plusieurs sociétés de remontées mécaniques vont se partager le domaine, dont :
- Les SPTV (Services Publics des Trois Vallées) appartenant au département et gérant la majeure partie des remontées mécaniques du Plateau des Tovets (Courchevel 1850) ainsi que du Praz
- La société des Téléskis de Pralong qui gère le secteur Pralong/Super Pralong ainsi que le téléski des Creux
- La société du Lac Bleu qui gère le secteur Bouc Blanc
- La société de Mr Obert gérant la TC Grangettes, le TK des Tovets et le TK des Roy à 1550
- La société du Dou du Midi qui gère le TSF2 du Dou du Midi ainsi qu’un TK école situé à côté du TS
- La STM (Société des Téléskis de Moriond) gérant l’ensemble du domaine de 1650
Petit à petit, les sociétés privées se font racheter par les SPTV jusqu’au rachat de la STM en 2000 et la création d’une seule entité gérant l’intégralité du domaine de la vallée de Courchevel : la SEM « Société des 3 Vallées » ou S3V.
Courchevel 1650, dit « Moriond l"ensoleillée », s’est développée de façon indépendante par rapport au reste de la vallée. En effet, le département n’avait aucun droit de regard sur ce territoire et c’est la commune de Saint Bon qui s’est chargée du développement de l’urbanisme à une époque où les relations entre le département et la commune étaient plutôt tendues. Côté remontées mécaniques, c’est la STM crée notamment par Laurent Boix Vives (PDG de Rossignol) qui gère cette partie du domaine. Il faut attendre 1962 pour avoir une liaison skis aux pieds entre 1650 et le reste du domaine grâce à l’aménagement du site de Praméruel avec le tk de Praméruel en direction de 1650, et le tk des Creux en direction de 1850.
Le télésiège de l'Ariondaz
C'est en 1961 qu'est construit le télésiège 2 places à pince fixe de l'Ariondaz reliant 1650 au replat des Marquis, la même année que feu le TSF2 du Dou du Midi à Courchevel 1550. Il semble que ces 2 télésièges soient les tous premiers de la vallée, sauf si la date de construction du TSF2 de la Vizelle est antérieure, ce que je ne suis pas arrivé à déterminer avec certitude. Je n'ai malheureusement que très peu d'information concernant ce TSF2 de l'Ariondaz qui paraît avoir été construit par Poma. On peut cependant aisément penser qu'il a été construit afin de desservir le "Domaine de l'Ariondaz", ensemble immobilier excentré du front de neige de 1650, ainsi que toute la zone le long de la route qui mène à 1850 et qui verra dans les années qui suivent, la construction de plusieurs résidences parmi les moins réussies de la station, en raison de l'absence d'une véritable réflexion de la part de la municipalité concernant l'urbanisme de ce secteur.
Voici un plan de la station datant de 1971 :

Il semblerait que ce télésiège comportait une station amont de type poulie flottante avec tension par contrepoids et donc une motrice aval fixe, même si cela n'est pas très visible sur la photo suivante issue d'une carte postale de l'époque :

Voici une autre photo d'une carte postale avec le TSF de l'Ariondaz, les 2 TK des Grandes Bosses (aujourd'hui disparus au profit du TSD6 du Signal sur un autre tracé) ainsi que le premier Tk de la petite Bosse sur la droite de l'image (installation remplacée en 1970 par un téléski plus moderne):

Le télésiège des 3 Vallées
Durant l'hiver 1983/1984, la brochure de l'office du tourisme annonce fièrement le remplacement du télésiège des Marquis par le télésiège des 3 Vallées. Ce qui est amusant, c'est que cette appellation de "télésiège des Marquis" n'est retrouvée sur aucun autre document, pas même sur le plan de la station figurant sur la même brochure. Quant au terme de "remplacement", il semble un peu excessif, étant donné, comme nous allons le voir, qu'il s'agit plus d'une grosse rénovation. Il est à noter que l'été 1983 fut riche en travaux, puisqu'il vit la construction de 3 télésièges (TSD3 Aiguille du Fruit, TSD4 de Plantrey et TSF3 des Creux Noirs, raccourci depuis), d'un téléski (doublement du tk de Super Pralong aujourd'hui disparu) ainsi que le déplacement de la gare d'arrivée du TSF3 des Crêtes à son emplacement actuelle tout comme celle du tk de Praz Juget (à l'époque tk du Bouc Blanc).
Le TSF2 des 3 Vallées n'a conservé de son prédécesseur que la ligne. Les gares ont été changées et remplacées par une motrice amont de type "Junior" et une gare aval tension. Les sièges ont eux cédé la place à des sièges 2 places de type "goutte d'eau". La ligne n'a subit que quelques modifications dont le remplacement de quelques têtes de pylônes, ainsi que la disparition de 2 pylônes (le n°1 et le n°15).
Notons enfin que ce TSF est également ouvert aux piétons et peut donc également être utiliser à la descente.
Voici les caratéristiques techniques de cet appareil :
- Nom de l'installation : TSF2 3 Vallées
- Constructeur : Poma
- Année de construction : 1961/1983
- Saison d'exploitation : Hiver
- Capacité : 2 personne(s)
- Altitude Aval : 1590 m
- Altitude Amont : 1895 m
- Dénivelée : 305 m
- Longueur développée : 1650 m
- Débit : 760 personnes/heure
- Vitesse d'exploitation : 2.3 m/s
- Emplacement Motrice Amont
- Emplacement Tension Aval
- Sens de montée : gauche
- Temps de Trajet : 11 minutes 57 secondes
- Nb Véhicules : 146
Situation sur le plan des pistes

La gare aval
La gare aval se compose de 2 futs métalliques supportant 2 poutres sur lesquelles roule un lorry comportant la poulie retour ainsi que 2 galets guides. La tension est assurée par 2 vérins hydrauliques, mais je ne suis pas certain qu'ils soient d'origine. Je pencherais pour une tension réalisée initialement par un contrepoids.
Situation générale avec la route menant à Courchevel 1850 juste en arrière de la gare, ainsi que le bâtiment datant de 1983 et comportant une salle hors-sac ainsi que des caisses pour prendre les forfaits.

Un petit zoom



De profil avec le P1 dont le fût date du P2 de 1961 et la tête de 1983.

Détail sur le système de tension

De plus près

Et maintenant, passons les portiques Skidata et embarquons...

Un petit coup d'oeil au passage sur l'armoire de commande

Et c'est parti

La ligne
Vue sur le début de ligne avec le P1 (ou 2 ?) et directement le P3

P3

Un regard en arrière

P4

Entre le P4 et le P5, on passe au dessus de l'ancienne "Piste Bleue"

P5 avec une double tête support-compression typique des premiers TSF Poma

Un dernier regard vers l'aval

P6

P7

P8

Passage au dessus de la piste des Indiens

P9

P10

Nous quittons la forêt

P11

P12

P13

P14

P16, le P15 n'existant plus

P17

P18

Une petite vue sur le Roc Mugnier

P19

Entre le P19 et le P20, la hauteur de survol devient importante...

...vue depuis l'amont...

...et depuis le début de la piste des Indiens



P20, dont la tête date de 1983

Arrivée en G2

La gare amont
La gare amont est une gare monofût classique pour l'époque.
Situation générale

De plus près

Vue d'en bas


De profil

De l'arrière

De trois quarts

L'autre profil

Pinces et véhicules
Les sièges sont de type "goutte d'eau"

La pince



Passage sur un support...

...et sous une compression

Conclusion
Un télésiège bien sympathique pour ceux qui apprécient de prendre le temps, avec en prime, une vue sur Courchevel 1850 et le massif de la Saulire absolument magnifique. Mais il semble que les jours de cet appareil soient comptés, et que la prochaine réhabilitation du front de neige de Courchevel 1650 sonne le glas de ce témoin d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître....
Je tiens également à remercier Persil et Monchu pour leurs précisions historiques concernant le TSF de l'Ariondaz