Hier encore, cette mystérieuse pince à
auto-serrage restait une énigme à nos yeux. La découverte récente de son
brevet nous as permis de faire un grand bon en avant sur nos connaissances techniques et historiques de cet ancêtre de la pince Giovanola.
Cette pince a été inventée par la
Société des Brevets Français d'Equipement Touristique qui fit une demande de brevet le 5 octobre 1948 (ce qui fera exactement 70 ans dans 5 jours!). Nous observons que la société manifesta une certaine prétention du fait de caractériser son brevet comme un "perfectionnement aux téléphériques monocâbles", sous-entendant une rectification de la pince Von Roll 101 développée 4 ans auparavent. Elle s'est donc inspirée de Von Roll en proposant une """""amélioration""""".
Technique et fonctionnement de la pince
En effet, si il y a bien un mot qui caractérise cette pince, c'est bien celui de l'inspiration. Le chariot reprenait la configuration d'un chassis tenu sur 4 galets de roulements comme Von Roll et sa VR101. Néanmoins, la particularité de cette pince était la disposition de la fixation de la suspente qui se situait entre les deux pairs de galets.
La pince vue de profile. À gauche: pince ouverte en gare à l'aide de rails latéraux, à droite: passage sous un pylône support ou compression.
La pince utilise un système dit d'
auto-serrage fonctionnant par
frottement ou
adhérence, lié à l'
accélération gravitationnelle .
La suite des explications se réfère au schéma ci-dessous:
Le levier
7 fixé au chariot sur l'axe
8 est solidaire d'une came
10 de manière que le levier vienne serrer par pression le câble entre la came
10 et la butée
11.
Le sens du mouvement du câble est celui de la flèche F (en direction de la gauche sur le dessin). À la montée, la chariot à tendance à glisser sur le câble dans le sens opposé à droite (puisque la gravité "tire" le chariot en direction du bas). Mais le "frottement" (la déformation) du câble par l'appui de la came
10 entraîne cette came avec ce même câble en direction de la montée (gauche). La came va exercer une rotation dans le sens des aiguilles d'une montre autour de l'axe
8 et va serrer ainsi davantage le câble contre la butée
11. Cela fonctionne comme un
levier de serrage.
Donc plus la pente est forte, plus le serrage est intense puisque que la came va plus s'enfoncer dans le câble et donc le serrer . Un faible ressort (jaune) permet à la came de toujours s'appuyer contre le câble même si elle ne le serre pas. Le ressort n'a aucun rôle dans la force exercée par la came. C'est donc une pince où le câble est serré par "lui-même "(combiné à la pente de la ligne et à la masse du véhicule), donnant ainsi son nom de pince à
auto-serrage.
À le montée (le câble se dirige à gauche), c'est le levier 7 et la came 10 qui permettent de serrer le câble. En descente, c'est le levier 15 et la came 13 qui viennent serrer le câble.
Lors du
débrayage, deux rails
12 et
12' viennent appuyer les leviers
7 et
15. Les leviers passent de la position fermée (bleu clair) à la position ouverte (bleu foncé). Les cames
10 et
13 exercent une rotation autour de l'axe
8 et
16 et desserrent ainsi le câble.
Pour l'
embrayage, le chariot accélère sur une pente inclinée et rejoint le câble. Les rails
12 et
12' s'éloignent pour permettre à la pince de se "serrer" par elle-même (!!!)
Giovanola et son premier tsd2
Les Ateliers de Constructions GIOVANOLA Frères Sa Monthey en acquirent rapidement une licence en vue de se lancer prochainement dans les marchés des remontées mécaniques débrayables, marché en plein boum qui a démarré en 1945 avec l'ouverture du tsd2 de Flims.
Fin 1948, la société du Télé-siège Évian-Thollon fut intéressée par ce projet de tsd2 (probablement car son coût en tant que prototype était moins cher que les modèles fabriqués par Von Roll). L'équipement, dont la construction fut entamée en 1949, inaugura un partenariat entre la British Ropeway Engineering Company (Breco) (via son représentant français : la STIME) et Giovanola qui testa ainsi ici la nouvelle pince à auto-serrage.
La conception douteuse de la pince (le serrage se faisait généralement après la sortie de gare dès l'inclinaison du câble et n'était pas garanti), l'absence de système de protection pour empêcher l'ouverture du mord en ligne ainsi que la faible résistance aux aléas (secousse, arrêt brutal,...) provoqua lors des tests un accident. Sans étonnement, un siège glissa sur le long de la ligne et révéla donc la déficience totale de la pince.
Malgré plusieurs modifications (notamment le déplacement du lieu de fixation de la suspente non plus entre les galets mais au dessous du levier d'ouverure), le système d'auto-serrage n'était pas viable. Giovanola, ayant appris de ses erreurs, créa la célèbre pince Giovanola. Mais ça, c'est une
autre histoire
Ce message a été modifié par Jubiproduction - 08 octobre 2018 - 10:06 .